Combat de l’oued Remel en 1782

Les batailles algéro-tunisiennes sont une série de conflits entre la régence d’Alger et la régence de Tunis , l’une d’elles fut la bataille de Constantine en l’an 1782.

Siège de Constantine

Après quinze jours d’une marche pénible, les différents corps arrivèrent en vue de la ville. Des forces considérables défendaient la position de Mansourah. Le lendemain, les deux armées en vinrent aux mains. Le choc fut terrible sans être décisif. Après six attaques successives, la victoire se déclara enfin pour les Tunisiens et s’emparèrent du camp ennemi.

Cette position dominait complètement la ville.

La porte El Kontra étant ouverte, l’état-major tunisien voulait que l’on donnât immédiatement l’assaut, que l’on achevât ainsi la victoire afin de s’en faire un mérite aux yeux de Hamouda Pacha qui aimait beaucoup les braves. Cet avis était bon et l’on aurait dû en profiter puisque les portes étaient ouvertes, ce qui prouvait les bonnes dispositions des habitants. Mais le généralissime des troupes, Soliman Kahia, homme habitué à faire la guerre ainsi qu’on la faisait dans les temps de la chevalerie, répondit aux officiers de l’état-major que-les troupes étaient exténuées, et qu’il serait toujours grand temps d’effectuer l’assaut le jour suivant.

Pendant la nuit, des agents du bey d’Alger s’étaient introduits dans Constantine et étaient parvenus, à force de présents, à changer l’esprit des habitants et à gagner les Flisséens. Ceux-ci s’engagèrent à tourner leurs armes contre Ingliz Bey, leur propre souverain.

Le jour parut, et l’on demeura tout surpris dans le camp tunisien de voir que les habitants avaient non-seulement fermé leurs portes, mais qu’ils les avaient fortifiées. Il fallut donc entreprendre un siège régulier.

Après deux mois d’une défense opiniâtre, les Tunisiens et leur général Soliman Kahia, se décidèrent à donner l’assaut. Mais ce général eut la mal* heureuse idée de recourir à une stratégie surannée et profondément ridicule.

Combat de l’Oued Remel

Il plaça à l’avant-garde des colonnes d’assaut cinq cents chameaux chargés d’échelles et les fit pousser vers la ville. Arrivés aux pieds des remparts, ces timides animaux furent tellement épouvantés par le feu violent que les assiégés avaient ouvert sur eux, qu’ils reculèrent précipita misent et se jetèrent avec leurs échelles sur les troupes qui les suivaient. Le désordre qui en résulta fut si grand que l’on crut à une sortie de la garnison. Ce spectacle était à la fois triste et risible. Pour parer au danger imaginaire de cette prétendue sortie, une partie des troupes s’était hâtée de regagner le plateau de Mansourah pour défendre les pièces qui s’y trouvaient établies.

Après cette échauffourée que l’on pourrait qualifier de défaite, les Tunisiens continuèrent à tirailler sur la ville, sans résultat marqué. Pendant ce temps, la saison mauvaise s’avançait à grands pas; les pluies et le froid faisaient considérablement souffrir les troupes.

Constantine siégée une armée de secours a été annoncée par Alger, et s’était mise en route; elle se composait de quatre-vingt tentes et avait établit son camp à l’Oued-Remel, et s’y retrancha. En même temps, un autre corps algérien, fort de quarante tentes, venant de Bône, s’avançait, à marches forcées.

Le Général Hmida Ben Ayed

A la vue des Algériens, les Tunisiens sous le commandement de Soliman Kahia attaquèrent le camp de l’Ouad-Remel, par la division les cavaliers de l’Arad, sous les ordres de Général Hmida Ben Ayed.

« Un instant, à la vue de leurs adversaires, le courage des Tunisiens se réveilla ; ils sentirent la nécessité de mettre de côté leurs passions, d’oublier leurs querelles , afin de réunir leurs efforts en commun dans la bataille qui allait s’engager. Toutes les dispositions ayant été prises, l’ordre de commencer l’attaque fut donné par Soliman Kahia. Aussitôt, la cavalerie tunisienne, contingent considérable fourni par les tribus de L’Arad et placée sous le commandement de Hmida Ben Ayed, déploya ses nombreux escadrons dans la plaine et fondit avec une intrépidité incroyable sur l’avant-garde algérienne.

Accueillie par une vive mousqueterie et exposée au, feu bien soutenu de la place, la division de Hmida Ben Ayed ne put forcer les rangs  algériens, qui résistèrent bravement à son choc terrible, et elle dut se replier sur le gros de l’armée, Hmida Ben Ayed fut fait prisonnier. Pendant que les Algériens emmenaient ce général, ses mameluks et ses soldats se ruèrent avec impétuosité sur son escorte et le rendirent à la liberté.

Retour à Tunis

Les affaires restèrent en suspens pendant plusieurs jours. A la fin, voyant qu’il lui devenait de plus en plus difficile de tenir devant l’ennemi, Soliman Kahia prit la résolution de battre en retraite. Profitant d’une nuit très obscure, il leva précipitamment son camp et se dirigea vers le Kef.

Bien que cette expédition n’ait pas eu d’issue fort heureuse, elle peut toutefois être considérée comme une victoire, car il est incontestable que les Tunisiens auraient pu pénétrer dans la ville s’ils avaient voulu profiter du moment où les portes en étaient ouvertes.

Les Tunisiens retournèrent dans leur capitale avec toutes les richesses enlevées dans le camp ennemi.

Suite à cette échec Hmida Ben Ayed se fait prisonnier sous ordres du Bey mécontent de cette défaite, Mohamed Hamouda Lasram, chef des zouaouas l’accompagne en signe de compassion et de respect.

Cela ne diminue en rien le dévouement du Caid Hmida Ben Ayed pour son Bey, suite à une nouvelle attaque des algériens, il met à disposition du Bey depuis sa prison toute sa fortune et sa grande cavalerie à son service pour combattre.

Depuis l’affaire de Constantine, les Algériens ne pensaient qu’avec dépit aux pertes qu’ils avaient reçuent. Ils voulurent s’en venger par la conquête de l’île de Djerba. A cet effet, ils opérèrent un débarquement dans cette île ; mais n’en connaissant pas la topographie, ils s’engagèrent imprudemment dans des marais d’où ils ne purent sortir. Pendant neuf heures, les habitants ne cessèrent de tirer sur eux sans que les algériens pussent faire usage de leurs fusils, parce qu’ils avaient jeté dans la mer les munitions et les armes dont le poids gênait leurs mouvements et compromettait les chaloupes dans lesquels ils se trouvaient embarqués.

A la nouvelle du débarquement des Algériens, Hamouda Pacha expédia de suite une escadre pour se porter au secours de l’île de Gerbi. Elle était composée de neufs bâtiments de tous rangs et marchait sous les ordres de Mohammed el Mouraly. Sur ces entrefaites, la flotte algérienne qui avait reconnu l’impossibilité de s’emparer de l’île, avait mis à la voile et s’était rencontrée avec celle des Tunisiens à la hauteur d’Hammamet. Au moment d’engager le combat, le général Mourales fut indignement trahi par ses capitaines qui eurent la lâcheté de fuir devant l’ennemi et ce fut un échec cuisant pour les algériens.

Extrait de “Histoire de Constantine” par Ernest MERCIER. Principales époques de la Tunisie : documents pour servir à l’histoire de ce pays / par A. Oualid

Par Kais BEN AYED


Communiqué de l’ASPB

Le jeudi 29 octobre a eu lieu à Paris, une première réunion de travail entre l’association de sauvegarde du palais Ben Ayed et l’union d’associations internationale REMPART.

Depuis 1966, l’union d’association REMPART réunit en France et à l’International des citoyens bénévoles qui ont la volonté d’agir ensemble pour la sauvegarde, la restauration et l’animation de leur patrimoine. 

Union REMPART organise des chantiers – séjours où des participants venus de tous horizons se rencontrent pour réaliser ensemble et bénévolement une action d’intérêt général autour d’un patrimoine.

En vue de la restauration du Palais Ben Ayed de Cedghiane à Djerba, l’union REMPART à réitérer son intérêt à collaborer avec l’ASPB et à venir dans les prochains mois effectuer une première visite du palais afin de prendre connaissance de son état et de rencontrer les différents acteurs de ce grand projet notamment l’institut national du patrimoine et les associations qui agissent pour le patrimoine de Djerba. L’objectif étant de réaliser une première action en organisant un chantier de bénévole durant l’année 2021, si la situation sanitaire le permet.

1794: les tripolitains attaquent Djerba

En l’an 1794, dans la nuit du lundi au mardi 27 septembre, neuf vaisseaux chargés d’un millier de soldats et commandés par Kara Mohammed arrivèrent de Tripoli. Ils étaient envoyés par Ali Borghel, où il se proclama gouverneur de cette ville après la fuite d’Ali Pacha El Ghrormali qui était allé se réfugier à Tunis avec tous ses enfants. Les vaisseaux jetèrent l’ancre sur la côte Sud du mouillage de Romela, près du bordj Aghir. Dans le premier tiers d’une nuit sombre et pluvieuse, les troupes tripolitaines descendirent à terre. Elles furent reçues par les Djerbiens, non partisans de la guerre qui étaient allés au devant d’elles pendant que le reste de la population se reposait insouciante. Les troupes tripolitaines réparties en trois corps firent leurs préparatifs pour le combat et le lendemain matin, à la pointe du jour, se répandirent dans l’île.

Chitiha Arabe de Djerba

Informé de l’arrivée des troupes, le Caïd Hmida Ben Ayed alors gouverneur de Djerba, mit son harem en sûreté dans la Zaouïa Abi-Zid et grimpa sur une monture au bordj El Kebir où il fut suivi de tous ses serviteurs. Les Tripolitains et les Djerbiens qui s’étaient joints à eux se rendirent dès le matin dans l’habitation du Caïd où ils se livrèrent au pillage, et un des serviteurs de ce dernier, Hafid El Hezami, surnommé Chebaz, ayant été tué, les autres prirent la fuite. Les troupes tripolitaines poussèrent ensuite jusqu’au bordj, d’où elles repartirent aussitôt n’ayant rien trouvé à prendre. Le Caïd Hmida ben Gassem Ben Ayed errait à l’abandon sur la côte lorsqu’il vit arriver un de ses navires, commandé par Abou-Merzak rentrant d’une razzia. Le Caïd monta sur une barque avec le reste de ses serviteurs et parvint ainsi au navire. Il ordonna Abou-Merzak de faire voile pour Sfax où il fut reçu par le Caïd Mahmoud Djellouli qui était venu au devant de lui et qui l’installa avec sa suite dans sa propre demeure. Informé des faits qui s’étaient passés, le jeudi 2 octobre 1794, le Caïd Mahmoud Djellouli en rendit compte par écrit au très élevé Hammouda-Pacha, à qui il envoya un messager.

Devenu le maître de l’île, Kara Mohammed se proclama gouverneur en remplacement du Caïd Hmida ben Gassem Ben Ayad qu’il calomnia ainsi que ses gens. Il se rendit ensuite au Souk El Kebir et fit annoncer par un crieur public, qu’il
accordait l’amen à la population de l’île ainsi qu’aux soldats encore dans les bordjs, qui lui remirent les clés sans résistance. Le samedi 4 octobre, Hammouda Pacha, ordonna ses troupes de reconquérir Tripoli. Il en confia le commandement à Mustapha Khodja, qui emmena avec lui les enfants d’Ali-Pacha El Ghrormali, Ahmed Bey et Youssef-pacha qui furent remis en possession de leurs biens.

Voulant reprendre Djerba, Hammouda fit appel à tous ses sujets tant soldats qu’arabes qui accoururent en grand nombre. Jamais souverain tunisien n’avait jusqu’alors obtenu un aussi gros contingent de volontaires. Le dimanche huit 5 octobre, à une heure de l’après-midi, les troupes se mirent en marche par la route de Kairouan. Le 7 novembre 1794, à une heure de l’après-midi, une immense flotte composée de gros vaisseaux outre les nombreux petits bateaux venus de Sfax, de Tunis et d’autres endroits, partit du port de Halk El-Oued (la Goulette) sous les ordres de El Hadj Ali Djeziri. Arrivée à Sfax, la flotte fut augmentée par des vaisseaux qui étaient venus se joindre à elle et le 25 novembre, la flotte arriva dans la rade de Djerba où elle rencontra des vaisseaux de guerre tripolilains qui s’en fuirent à Tripoli pour informer Ali-Pacha de l’arrivée de la flotte tunisienne à Djerba.

Les vaisseaux restèrent sept jours en rade sans combattre ; mais le huitième, qui était un mercredi, 26 novembre, année 1794, les troupes débarquèrent sur la côte du Bordj Djelidj et Kara Mohammed qui leur avait livré bataille dans l’après-midi de ce même jour fut complètement défait malgré ses retranchements en terre. Après sa défaite, Kara Mohammed s’enfuit avec ses serviteurs sur la côte sud qui est celle où il avait débarqué la première fois. Des vaisseaux tripolitains chargés de matériel de guerre se trouvant à cette même époque dans le port de la Séguia arrivèrent à leur secours et les amenèrent à Tripoli le jeudi 27 novembre. Kara Mohammed était resté maître de l’île pendant cinquante-huit jours. Les soldats tripolitains restés à Djerba devinrent les sujets de El Hadj Ali Djeziri qui fut nommé gouverneur après le départ de Kara Mohammed. Livrés à eux-mêmes et autorisés par El Hadj Ali Djeziri, les soldats Tunisiens pillèrent le Souk El Kebir ainsi que la Zaouïa des Djemeniine qui ne fut pas plus épargnée que le Maâkal (lieu d’asile) du Djamaâ Mahboubine et autres. Tous les esclaves qu’ils rencontrèrent furent pris par eux et ceux qui ne purent être rachetés par leurs maîtres furent emmenés à Tunis.

Deux jours après l’arrivée des troupes tunisiennes à Djerba, Ahmed Gourdji (géorgien), aide-de-camp du Caïd Hmida Ben Ayed arriva avec des Arabes de l’aârad par le passage de Tarbella, précédant de deux jours le Caïd Hemida ben Aïad qui passa par El Kantera suivi d’autres arabes. Après leur arrivée, le Caïd Ben Aïad et son aide-de-camp se rendirent auprès de El Hadj Ali qui était chargé de l’administration de l’Ile où il n’exerça son commandement pendant environ soixante jours. Lors du retour à Tunis de El Hadj Ali Djeziri qui ramena la flotte en parfait état, Hammouda-Pacha qui avait été informé des méfaits commis par lui à Djerba, le réprimanda de la façon la plus sévère au point qu’il en devint fou. Il fut alors mis aux carcan et aux fers où il mourut dans d’affreux tourments.

Il fut remplacé dans son commandement par le Caïd Mustapha Ben Hassine El Kebir qui partit pour Djerba le lundi 15 juin 1795. Destitué lui-même le vendredi, 27 Aout 1795, il fut remplacé par le Caïd Younes, fils du Caïd Hmida Ben Ayed qui arriva à Djerba un vendredi à midi, le vendredi 3 novembre 1797.

K Ben Ayed

Du Borj Ben Ayed de Gammarth à Marseille

On dit que c’est à son retour de mission en France (1831) auprès du Roi Louis-Phillipe que Sidi Mohamed ben Ayed aurait entrepris, au sommet du Cap Carthage, la construction d’un nouveau pavillon de plaisance. Elevé à l’écart, il devait jouir d’une étendue sur la campagne et sur la mer.

C’est un château de forme circulaire, élégant et bien aéré. De ses nombreuses et belles fenêtres, on domine tout l’horizon, la vue de la mer et des jardins de la Marsa que l’on peut compter, cela ajoutait beaucoup à l’agrément de cette habitation, perchée sur le point le plus élevé des environs.

Mahmoud ben Ayed le rendit célèbre par le luxe qu’il y déploya à l’occasion des fêtes nocturnes auxquelles il conviait ses amis. Le bâtiment se dressait sur une véritable plate-forme émergeant de vergers ininterrompus amandiers, oliviers, vignes, jujubiers partagés par une allée bordée de figuiers.

On peut imaginer le raffinement que Mahmoud ben Ayed se plut à montrer en cet endroit que devait remplir l’éclat des ors, des miroirs et des verreries. Il ne s’agissait plus d’y organiser de froides et cérémonieuses réceptions officielles comme dans les autres palais. Véritable lieu de plaisir, le « Balace » de Gamarth bénéficiait de l’isolement et de la tranquillité nécessaires. Ici les brillantes et joyeuses festivités organisées par le ministre favori d’Ahmed bey étaient à ses amis en l’honneur desquels étaient conviés musiciens et danseuses.

Borj Ben Ayed, actuellement à l’emplacement du Golden Tulip Gammarth

Le départ de Mahmoud Ben Ayed

Ce fut un incident à la Mohammedia qui aurait décidé Mahmoud Ben Ayed à quitter Tunis à la suite d’une critique publique qui lui fut infligée par le général Mrabet à la demande du bey en présence des officiers supérieurs de l’armée beylicale, au sujet de ses achats de blé en Egypte. Ben Ayed sentit alors la confiance du bey sur le point de lui échapper. Ce qui était arrivé à Youssef Saheb Ettabaa, l’ami de son grand père Hmida Ben Ayed allait se répéter. Ses rivaux préparaient sa chute, en le discréditant au près du Bey, Ben Ayed préparait son départ.

Le général Ben Ayed avait toujours un coup d’avance. Il avait installé au pied de la colline une fabrique de poterie. Il fit travailler là, notamment, des artisans siciliens et napolitains, dont certains avaient été capturés sur les côtes. Ceux-ci apportèrent les méthodes de leurs pays et influencèrent la production de cette faïencerie. La fabrique aurait aidé à sauver sa fortune dans des poteries sans éveiller de soupçons.

Ben Ayad s’embarqua sur un voilier en pleine nuit qui l’attendait à l’abri du Cap Gammarth, lors d’une de ces soirées tapageuses qui l’aurait mise à profit pour rendre inaperçue son départ en y laissant femmes et enfants pour gagner la France un 14 juin 1852.

Le départ de ses femmes et enfants.

C’est dans cette dernière demeure que Mahmoud vit pour la dernière fois ses femmes et enfants. Ne voyant pas son ministre de retour et ayant appris son installation à Paris, Ahmed Bey entra dans une colère rouge et fit confisquer tous ses biens, et si des amis n’étaient pas intervenus, il eût fait saisir ses enfants et ses femmes et les eût jetés dans les prisons du Bardo. Mais grâce aux conseils de Mustapha Khaznadar il se contenta de les faire garder à vue dans le palais de Gammarth.

Pendant de longs mois Ben Ayed écrivit à ses amis de lui envoyer son enfants et ses épouses mais personne n’osait contrevenir aux ordres-du bey. Enfin, le consul de France reçut avis de son gouvernement de disposer le bey à faire embarquer la famille Ben Ayed. Ce fonctionnaire comprenant les conséquences que cet ordre causerait à Ahmed Bey, n’osa pas le lui communiquer, et il agit sagement.

Sous un vain prétexte, des familles françaises pénétrèrent auprès des femmes de Ben Ayed, elles les habillèrent avec à la mode européennes et trompant, par ses déguisement la surveillance des soldats, ces dames sortirent de leur prison, gagnèrent la chapelle Saint-Louis, d’où une nacelle les porta à bord du courrier français en direction de Marseille. Mahmoud Ben Ayed les accueilli de façon triomphale pour les conduire à Paris, dans son nouveau palace parisien aux abord de la Seine.

Ruine du Palais Ben Ayed de Gammarth

Peu après le départ de la famille Ben Ayed, le palais et la faïencerie furent abandonnée. Chaque fois qu’on avait besoin de matériaux de construction et d’ornementation, on allait piller ce château et sa fabrique de poterie.

Par Kais BEN AYED

Ali Ben Ayed dit Hader Bach

Ali Pacha 1er

Ali 1er Pacha et le fils de Mohamed Bey frère aîné d’Hussein Ier Bey . Il devient gouverneur du Kef et de Sousse puis il est investi comme prince héritier le 17 janvier 1706 par son oncle Hussein et reçoit, à la suite de la demande de ce dernier, le titre de pacha en 1724 de la part du sultan ottoman.

Ali Pacha 1er est remplacé par son cousin Mohamed Rachid, le fils aîné d’Hussein Bey, en 1726. Il se réfugia à Alger, où, après avoir langui de nombreuses années, il finit par obtenir du Dey une armée qui le remit en possession de ses États. Il parvient à déposer son oncle Hussein Ier Bey le 7 septembre 1735 avec l’aide des troupes du dey d’Alger : il fait son entrée solennelle dans Tunis, précédé de son fils aîné Younès, en promettant aux habitants que leurs biens seraient respectés.

Ce qui n’empêche pas, durant les jours suivants, l’armée du dey d’Alger, campant sous les murs de la ville, de piller les magasins et les demeures particulières.  Le trésor était épuisé. Ali Pacha 1er ne pouvait faire face aux exigences de ses alliés; et un jour, lassé d’attendre, les chefs de l’armée algérienne vinrent lui signifier au milieu de sa cour, qu’ils avaient résolu, ou d’obtenir le payement qui leur était du, ou de le ramener à Alger comme leur gage. Le malheureux prince se désespérait: il n’avait ni crédit ni argent, “Qui donc me sauvera? ” criait-il dans son angoisse. L’oncle du général Hmida Ben Ayed, Hadj Ali-Ben Ayed le djerbien, était présent :

— Moi ! répondit-il.

— Insensé! où trouveras-tu tant d’argent?

— Combien vous faut-il?

— Il fallait quatre millions.

— Hader Bach ! je suis prêt ! répliqua Hadj Ali, et il versa immédiatement l’énorme somme nécessaire pour délivrer le pays du poids de cette occupation. Ali Ben Ayed de Djerba paya cette somme en pièces d’argent qu’il fit charger sur 35 mules, et Ali Bey s’engagea à verser un tribut annuel de 50 000 piastres au Dey.

Le jour du départ de l’armée algérienne, une illumination générale célébra la générosité d’Hadj Ali Ben Ayad et la délivrance de la ville. La reconnaissance du peuple décerna au libérateur pour surnom le mot qu’il avait prononcé, en faisant son offrande; il devint désormais son nom : Hader Bach l je suis prêt !

K.BENAYED

Quelques lettres de notre passé

Nous présentons ci-dessous, quelques unes des nombreuses lettres écrites ou citant diverses personnes du clan Ben Ayed, dont les Caïds Hmida, Mohamed, Hmida Ben Abderahmen, et Mahmoud Ben Ayed, sans oublier une lettre de la princesse Lesley Ben Ayed épouse du prince Abdullah Ben Ayed.

Lettre destinée à Si Hmida Ben Ayed, général et Caïd de l’Aradh.

Lettre destinée au Caïd de l’Aradh Hmida Ben Ayed du 17 mai 1817 et citant Si Slimen Fekih Ahmed.

الحمد لله و صلى الله على س يدنا محمد و سلم.
حفظكم الله تعالى بمنه و تولاکم بلطفه، المکرم الأجل المحترم بالله ز و جل المرز س يد
حميدة بن عياد اکرمه الله وافيا.
السلام عليكم و رحمة الله و برکاته وبعد.
تعلم س يد رعاك الله، قدم الى طرفنا تابع الس يادة س يد سليمان العلام،و تحاسبنا بعد
على دراهم ال يت الذ على أأيدينا و بما بيننا الحساب، ولم باقي بطرفنا الى الس يادة سوى
أأ ب رعة مائة ريال و تسعة زشر ريال. و باقي لنا المصروف الذ صرفنا على زيت المهدية،
الي يقدم الى طرفنا فيه سليمان بن الفقيه احمد و زطانا المصروف، ذلک المراد و ان لم
يعط نأأخذ ذلك من الدراهم المذکورة بأأيدينا. و کذلک س يد باقي الى الس يادة بطرف
الذمي ميمون ثلاث ماية ريال مثل ما زرفناکم سابقا، وهذه زندنا زرفناکم به و لا نريد
سوى الخير و السلام.
من تابعكم مقلل بأأيدکكم الکرام محمد قلاز ،لطف الله بالجميع أأمين.
في 17 رجب الأصب 1232

Deuxième lettre de Si Hmida Ben Ayed

Lettre de Hmida Ben Ayed de Novembre 1795.

اجتهدوا في الخلاص بالعزم و النجاز في غير زهدة و لا تراخي و لا غفلة و لابد …

” جمادى الأولى 1210ه “القايد حميدة بن عياد

Lettre citant Si Mohamed Ben Ayed

Lettre citant le Caid Si Mohamed Ben Hmida Ben Ayed

الحمد لله
ترتبت للمكرم الأجل المرعي المبجل المحترم الأكمل القاري النبيه محمد بن عياد قايد الأعراض في التاريخ بذمت (بذمة) المكرم الأجل الشيخ محمد بن الحمروني الصنهاجي الشننّاوي القابسي و المكرم الحاج بلقاسم ابن عبدالله السنوسي الشنناوي القابسي و المكرم بوبكر بن عزيز بن عبد الدايم من القبيل و المكرم بلقاسم بن الحاج علي الراشدي من القبيل و المكرم محمد بن حسن البدروش و المكرم الحاج علي بن محمد بن جابر من القبيل و المكرم منصور بن احمد العكروت من القبيل الف ريال واحدة سكة الوقت من وجه سلف بالمعروف قبضوها منه بالسواء بينهم باعترافهم يدفعوا له ذلك بالحلول من غير قول لهم و لا حجة شهد على اشهادهم بذلك ….
… مع أن من عرف الجميع الشيخ عمر بن سليمان عازق الدويري و المكرم بلقاسم بن علي حرّاق الدويري و بمعرفتهما …

Lettre de Ahmed Bey destinée à Si Mahmoud Ben Ayed

Lettre de Ahmed Bey 1er au Caïd Mahmoud Ben Ayed en Juillet 1849.

لحمد لله،
الهمام المقرب الثقة الأحضى الأرضى الأعز أمير اللواء ابننا محمود بن عياد حرسه الله أما بعد السلام عليكم و رحمة الله فانك تخلفت عن القدوم الى المحمدية مدة و تحيرنا من ذلك و المانع خير ان شاء الله و أعلم أنه غدا ليلة الخميس المبيت عندنا بالمحمدية على العادة الدايمة ان شاء الله فاقدم و لا تتخلف الا لعذر و عافاكم الله و ابعث الزلابية و المخارق و المدموجة و العشا مثل العادة و دمتم في أمن الله.
و السلام،
من الفقير الى ربه تعالى عبده المشير أحمد باشا باي وقيه الله آمين و كتب ليلة الأربعاء 11 رمضان 1265،

Extrait de lettre citant Si Hmida Ben Abderahmen Ben Ayed

Lettre citant le Caid Hmida Ben Abderahmen Ben Ayed de 1865.

الحاج مصطفى بن المرحوم محمد الساحلي شهر بوخروبة و محمد بن حمودة البليدي و حسن بن ساسي الشايب به عرف كلاهم صبي معصرة …محمد بن علي الدويري رايس معصرة حميدة بن عياد داخل سور باب الجديد

… 1281ه

Lettre de Si Mahmoud Ben Ayed pour la fondation de la Banque Nationale de Turquie

Lettre de Sidi Mahmoud Ben Ayed pour la fondation de la Banque National de Turquie en 1879.

Lettre de Sir Thomas Reade, citant Si Mohamed Ben Ayed.

Lettre de Sir Thomas Reade, citant Sidi Mohamed Ben Ayed pour sa contribution dans la lutte contre l’abolition de l’esclavage dans la Régence de Tunis (1842).

Communiqués de Si Mohamed Ben Ayed

Communiqué de Sidi Mohamed Ben Ayed de 1824 – بيان تقييد أنفار من الدويرات عليهم قناطر حشيشة السنا حرم لمحمد بن عياد قايد الأعراض 1240
بيان تقييد قناطير حشيشة السناحرم على جماعة الدويرات لمحمد بن عياد قايد الأعراض Communiqué de Sidi Mohamed Ben Ayed de 1814 – 1230

Lettre de la princesse Lesley-Maud Ben Ayed

Lettre de la Princesse Lesley-Maud Ben Ayed de 1948.

Nos remerciements à Mrs. Samy et Mohamed Zied Fekih Ahmed et M. Laroussi KHEMIRA pour leurs recherches.

Kais BEN AYED

Napoléon III, Mahmoud Ben Ayed et une délégation tunisienne à Paris

Arrivée à Paris de la délégation du Bey de Tunis

En 1853, après maintes démarches insistantes et diverses tractations plus ou moins secrètes effectuées par Ahmed Bey, le nouvel Empereur des Français, Napoléon III, exprima son accord, en vue de recevoir un ambassadeur dépêché par ce Prince Husseinite, avec, pour mission, de lui exprimer les compliments de la Régence de Tunis…

Au bout de plusieurs jours de voyage en Méditerranée, puis à travers la France, la délégation arriva, enfin, à Paris, le samedi 26 février 1853 à 22h.45.

Le Général Réchid et ses compagnons (Rousseau, Clément, le Capitaine Mourad et le Valet de chambre Zarrouk) trouvèrent, à la gare, Jules de Lesseps, l’agent du Bey, à Paris, venu les attendre pour les conduire chez Mahmoud Ben Ayed.

Mahmoud Ben Ayed

Et ce fut dans la voiture de ce dernier (aussi somptueuse que possible) que l’ambassadeur et sa suite arrivèrent au Palais parisien de celui qu’Alphonse Daudet appellera « Le Nabab ».

Le Palais Ben Ayed à Paris

L’Hotel Collot (Anciennement Palais Ben Ayed à Paris)

Le Palais Ben Ayed (aujourd’hui l’Hotel Collot – Galerie Kugel) est un immeuble portant le n°25 du quai d’Orsay et haut de trois étages. Il avait comme dépendance un second bâtiment dont il était séparé par une cour décorée de plantes vertes. Ce pavillon était à l’époque habité par Jules de Lesseps, agent du Bey à Paris.

Le capitaine Mourad dans son journal nous précise la situation de ce palais, “limité à l’Est par le fleuve qui traverse la ville, qu’on appelle la Seine et où l’on voit des bateaux-lavoirs, etc… au Nord par des immeubles dont le Palais du Gouvernement (sans doute le ministère des Affaires étrangères), à l’Ouest et au Sud par des immeubles appartenant à des particuliers.”
Pour donner une idée du train de vie et de l’organisation de Mahmoud ben Ayed, Mourad donne une liste de ses serviteurs musulmans et français, avec l’indication de l’emploi et des gages de chacun d’eux. Secrétaires, commissionnaires, portiers, cuisiniers, valets de chambre, préposés à l’entretien
des lumières, etc., sont au nombre de seize, et le total de leurs gages s’élève à 670 frs par mois. La maison est organisée « à l’européenne », et aucun de ces employés ne fait le travail d’un autre, note Mourad.

Mahmoud Ben Ayed accueillit ses hôtes avec joie, leur souhaita vivement la bienvenue et les conduisit, vu l’heure, aussitôt à table.

Après le dîner, tout le monde gagna la salle de réception richement décorée de consoles, de lustres et de candélabres. Sur les murs de cette salle « digne d’un sultan » selon l’appréciation de Mourad, figuraient, en bonne place, dans des cadres dorés, les portraits d’Ahmed Bey et de Napoléon III.

Cette salle et la chambre à coucher attenante étaient réservées, par Ben Ayed, à l’ambassadeur. Le médecin Clément, Rousseau et le capitaine Mourad furent logés dans des pièces parfaitement aménagées à l’étage supérieur.

Dans la matinée du dimanche, Réchid remit à Ben Ayed une lettre d’Ahmed Bey et deux lettres de Mustapha Khaznadar son premier ministre. Ensuite, il accorda une audience à Jules de Lesseps et à Charles Lagau, un ancien chargé d’affaires et consul général de France à Tunis ; Lagau, dont la mère était une de Lesseps, était venu en particulier, pour accompagner son cousin. De plus, il était là pour égrener des souvenirs sur la visite, effectuée à Paris sept ans plus tôt par Ahmed Bey et qu’il avait accompagné dans la capitale française en cette occasion mémorable.

Le Général Réchid lui remit, à lui aussi, des messages de Mustapha Khaznadar. A son tour, le Général Esterhazi, qui avait dirigé la mission militaire française dans la Régence, fut reçu par le Général Réchid qui, également, lui remit une lettre du premier ministre et lui transmit les compliments du Bey.

Mahmoud Ben Ayed organise très souvent de somptueux diners dans sa prestigieuse résidence parisienne, dans les notes du capitaine Mourad nous apprenons que :

Mercredi, 13 avril. – Ben Ayed offre en son palais un dîner au ministre des Affaires étrangères, à d’autres ministres, à des maréchaux et généraux.
Mercredi, 20 avril. – D’autres personnalités officielles et des officiers généraux, parmi lesquels Youssouf, dînent chez les ambassadeurs de Tunis..
Mercredi, 27 avril. – Nouveau dîner au Palais Ben Ayed en l’honneur de généraux et d’ambassadeurs étrangers.
Jeudi, 28 avril. – Soirée -aux Tuileries offerte par l’Empereur. Rachid, Ben Ayed, de Lesseps, Rousseau, Clément, .y assistent.

Mercredi, 4 mai. – Ben Ayed a pour invités l’oncle de l’Empereur et tous les princes et princesses de la Maison impériale. Avant le dîner, le prince Jérôme annonce des décorations:
Rachid est promu à un grade supérieur, et Clément est nommé à l’ancien grade de Rachid (aucune précision, mais il s’agit certainement de la Légion d’Honneur: officier pour Rachid, chevalier pour. Clément). Les diplômes sont remis aux intéressés. Les invités ne se retirent que tard dans la soirée.

Visite officielle à l’empereur Napoléon III

C’est le mercredi 9 mars 1853 qu’eut lieu la visite officielle à l’Empereur.
A 12h.30 arriva le deuxième introducteur des ambassadeurs, Feuillet de Conches. Il était monté dans une voiture de la cour, conduite par un cocher aidé de deux valets de pied et escorté par trois cavaliers de la garde impériale en grand uniforme. Feuillet de Conches déclara, aussitôt, qu’il était chargé par l’Empereur de conduire l’ambassadeur de Tunis et sa suite auprès du Souverain.

A 13 heures, Réchid, Mahmoud Ben Ayed, Feuillet de Conches et Jules de Lesseps prirent place dans la voiture de Mahmoud Ben Ayed. Tout le monde était en grand uniforme.
A l’arrivée, au Palais des Tuileries, la garde présenta les armes. Les membres de la mission furent introduits dans le premier salon où se trouvaient, déjà, plusieurs ministres et hommes d’Etat.

L’arrivée des tunisiens fut aussitôt annoncée à l’Empereur.
Au bout d’un quart d’heure, le premier introducteur des Ambassadeurs vint les appeler. Ils pénétrèrent, alors, dans un grand salon. Là, ils trouvèrent Napoléon III debout en grand uniforme, ainsi que le premier interprète Desgranges et le deuxième introducteur des ambassadeurs, Feuillet de Conches.

Les Tunisiens saluèrent, selon l’usage, puis le Général Réchid s’avança en tenant à la main la lettre d’Ahmed Bey et s’exprima en ces termes :
« Notre seigneur et maître présente ses salutations à sa Majesté l’Empereur, dont l’avènement au trône l’a grandement réjoui ; c’est pour exprimer sa joie qu’il lui adresse cette lettre, le félicitant de son accession à la dignité impériale ».

L’interprète, alors, s’avança, traduisit et ajouta :
« Son Altesse le Pacha de Tunis a déjà un ambassadeur à Paris, le Général Mahmoud Ben Ayed, mais, pour exprimer sa joie insigne, il a tenu à adresser, à votre Majesté, ce message et à le confier à un deuxième envoyé. Son Altesse a chargé ces deux ambassadeurs de présenter ses félicitations à votre Majesté ».

L’Empereur répondit :
«J’ai été, également heureux, d’apprendre l’arrivée de cet ambassadeur, sachant l’estime dont il jouit auprès du Pacha. C’est un des généraux les plus renommés de son entourage et je vois dans cette mission une preuve de l’amitié et des sentiments fraternels et cordiaux qui règnent entre nous, mais nous avons appris avec peine que son Altesse est malade et nous savons qu’elle compte venir à Paris afin de s’y soigner… Nous espérons que ce voyage lui apportera la guérison et que nous pourrons avoir la joie complète de savoir sa santé bien rétablie ».

L’interprète dit alors :
« Nous avons appris, en effet, qu’il compte venir à Paris, mais seulement lorsque la vapeur Mogador » pourra aller le chercher à Tunis ».

Napoléon III sourit, montrant sa satisfaction :
« La chose est facile », dit-il, « le Mogador et d’autres bateaux peuvent être mis à sa disposition. Ce qui nous réjouirait, ce serait de le voir et de fêter son retour à la santé ».

Le Général Réchid présenta, alors, la lettre du Bey et l’empereur s’approcha lui-même pour la prendre. L’introducteur des ambassadeurs la reçut ensuite des mains du Souverain et la déposa sur une table proche.

L’Empereur, s’adressant au Général Mahmoud Ben Ayed lui dit : « J’ai appris que vous avez acheté quelques propriétés à Paris ».

Ben Ayed répondit par l’affirmative.
Napoléon III dit ensuite au Docteur Clément : « Je sais que vous êtes Français et médecin dans l’armée tunisienne ».

Puis il lui demanda son nom et la durée de son séjour en Tunisie.
Clément répondit après s’être présenté qu’il est né en Tunisie de père et mère français et qu’il est médecin du 2ème Régiment de l’Armée Tunisienne à Sousse sous le commandement du Général Réchid.

L’Empereur posa enfin des questions au capitaine Mourad, qui se nomma et indiqua son grade et son titre d’aide de camp.
Avant de laisser sortir la délégation, Napoléon III complimenta le Général Réchid et le chargea de transmettre ses salutations au Bey.

Extrait de Revue Africaine Volume 90.

Extrait d’histoire: l’abolition de l’esclavage dans la régence de Tunis

L’esclavage a été aboli en Tunisie le 23 janvier 1846 sous le règne de Ahmed Bey. Le 2 février 1846, Sir Thomas Reade, consul général de Grande Bretagne, sans lequel cette décision historique aurait tarder à voir le jour organisait une réception afin de remercier toutes les personnes qui ont rendus cette mesure possible.

Décret d’Ahmed Bey du 23 janvier 1846.

Le consul général, accompagné de Monsieur Ferrier son vice-consul, Monsieur Santillana, chancelier du consulat et son fils, Messieurs Richardson et Holman, les célèbres explorateurs, quittèrent Tunis en direction du Palais du Bardo.

Le Bey les reçus de façon très cordiale dans sa salle d’audience privée en compagnie de ses ministres. Parmi lesquels et à ses cotés, Si Mustapha Khasnadar, son favori et ami intime, Si Ahmed Ibn Abi Dhiaf, son secrétaire privée du Bey, le chevalier Raffo son ministre des affaires étrangères, et Monsieur Bogo, son ministre des affaires liés aux résidents européens.

Ahmed Pacha Bey

James Richardson, donna les lettres de remerciements et les signatures au chevalier Raffo afin de les présenter au Bey. Ahmed Bey les donna alors à son secrétaire Ahmed Ibn Dhiaf pour les lire en langue arabe, les traductions en arabes ayant été préalablement faites. Le café fut servi avant la lecture des documents pour tous les visiteurs.

James Richardson

Le premier document qui fut présenté était la lettre de Monsieur Richardson dont voici un extrait:

“Je présente à votre Altesse au nom de Dieu, que tous chrétiens et musulmans adorent, nos remerciements et notre témoignage de gratitude signés par les officiers britanniques. Commerçants et résidents de Malte, de Gozo, de Gibraltar, de Florence, de Livourne, de Naples, de Smyrne et de Tripoli, remercient votre Altesse, pour ses premières étapes préliminaires que votre Altesse a décidé de franchir en vue d’abolir l’esclavage dans votre royaume. Parmi les noms, qui soutiennent votre décision, votre Altesse trouvera plusieurs gentlemens britanniques du plus grand talent et au rangs les plus éminents qui se sont spontanément manifestés pour vous témoigner leurs admirations et leurs gratitudes pour votre noble conduite philanthropique pour soulager la souffrance de l’Humanité et reconstruire de nouveau la grandeur de l’Afrique du Nord…”

“Nous sommes convaincus que votre Altesse a obtenu plus d’honneur pour cet acte en faveur de l’abolition de l’esclavage que n’importe quel prince musulman n’a jamais acquis par la guerre ou la conquête, ou par la promotion des arts ou de la science, et nous sommes persuadés que si votre Altesse continue ce grand travail d’émancipation pour l’Afrique, le nom de votre Altesse sera couvert de gloire …”

“Nos compatriotes sont profondément conscients du grand mérite du représentant de leur souverain à la cour de votre Altesse, qui a humblement et sans cesse représenté à votre Altesse le grand bien que ferait cette mesure et la réputation que votre Altesse pourrait acquérir en Europe et dans le Monde …”

” Nous sommes heureux d’apprendre également que des Français éclairés et philanthropes ont félicité Votre Altesse pour votre noble détermination à abolir l’esclavage, car dans cette immense mesure d’humanité, les rivalités nationales s’éteignent…”

Puis a suivi la lecture de remerciement de la British and Foreign Anti – Slavery Society. Lors de la lecture de ces documents, le Bey se montrait parfois très agité, et lancé des paroles en italien et en arabe, mettant sa main sur sa poitrine, et ajoutant: ” Je l’ai fait de bon cœur “!

Son Altesse s’est ensuite adressé à M. Richardson en ces quelques mots:

“Je vous suis très reconnaissant, Monsieur, de la peine que vous avez prise à préparer ses témoignages et à obtenir les signatures. Je suis extrêmement reconnaissant à ceux de vos compatriotes qui vous ont délégué de me présenter ces témoignages. Je suis profondément sensible au grand honneur qui m’a été ainsi conféré. Et je ne manquerai pas de saisir toutes les opportunités qui sont en mon pouvoir pour améliorer la condition des Noirs d’Afrique. J’ai commencé avec plaisir l’abolition de l’esclavage, et je ne cesserai de poursuivre le grand travail d’émancipation que lorsque j’aurai complètement extirpé l’esclavage de mon royaume.”

Une fois ces paroles terminés les visiteurs prirent congé de Son Altesse. Ils étaient très flatté de voir la cordialité qui existait entre Sir Thomas Reade et le Bey.

“Nous ne pouvons clore le récit sans présenter nos remerciements à Sidi Mohamed Ben Ayed, qui s’est beaucoup intéressé à la réussite de notre mission. Sidi Ben Ayed est l’un des principaux courtisans de Son Altesse le Bey; il est le personnage le plus opulent et le plus influent du royaume de Tunis et il y joui de grande faveur. En effet, sa générosité et son caractère aimable, ainsi que sa connaissance des pays chrétiens (car il a été en Europe), font de lui un favori universel. Sa famille est très puissante et possède un excellent caractère. Sidi Ben Ayed, pour des raisons urgentes, n’était pas présent à la réception, mais a exprimé ses plus chaleureuses sympathies pour le succès de la mission. “

Extrait de The British and foreign Anti-Slavery Reporter citant l’implication du Général Mohamed Ben Ayed dans l’abolition de l’esclavage en Tunisie.
Lettre de Thomas Reade citant l’implication du Général Mohamed Ben Ayed dans l’abolition de l’esclavage en Tunisie.

(Extrait de “The British and Foreign Anti-slavery Reporter”)

La reine Victoria, Lord Palmerston, Sir Thomas Reade et Sidi Mohamed Ben Ayed

Depuis les années 1840, la famille Ben Ayed était une alliée stratégique de la couronne britannique. En effet Sidi Mohamed Ben Ayed, très prévoyant, en incluant ses descendants (hormis son fils Mahmoud Ben Ayed) avaient obtenus le statut de protégés britanniques après la mort de Hussein II Bey dont il était le fidèle serviteur et son conseiller le mieux averti.

Sidi Mohamed Ben Ayed

Sidi Mohamed était l’une des personnes les plus influentes de la régence, ambassadeur et envoyé extraordinaire du Bey au roi Louis Philippes en 1831, où il observa toute la puissance des armées européenne, il permit grâce à ses conseils d’éviter une guerre in extremis entre la régence et le royaume de Sardaigne.

Sir Thomas Reade, consul général de Grande Bretagne de l’époque comprend rapidement qu’il doit en faire un précieux allié, dans son combat pour l’abolition de l’esclavage dans lequel Sidi Mohammed Ben Ayed jouera un rôle considérable en 1846.

Sir Thomas Reade

Sidi Mohammed Ben Ayad laisse peu à peu son fils Mahmoud prendre le relais pour devenir en peu de temps le financier omnipotent de la régence sous Ahmed Bey 1er.

En 1847, Sidi Mohamed Ben Ayed se brouille avec son fils Mahmoud et le Bey au sujet de diverses affaires notamment la création de la Banque de Tunisie pour laquelle il était contre. Se sentant menacé il cherche refuge auprès de son ami Sir Thomas Reade avec son neveu Hmida Ben Ayed au consulat britannique qui en informe Lord Palmerston à Londres.

Lord Palmerston

Lord Palmerston, premier ministre de sa majesté la Reine Victoria ordonne à son représentant à Tunis, Sir Thomas Reade de veiller à la protection de Sidi Ben Ayed et envoi un message à son altesse le Bey de la part de la reine Victoria on ne peut plus clair:

“Sa majesté la reine Victoria ne tolérera en aucun cas que l’on touche à un seul cheveu de Ben Ayed.”

Sa majesté la Reine Victoria

“La famille Ben Ayed se succéda durant de nombreuse année dans la gouvernance de L’île de Djerba, elle appartient à l’une des rares familles restantes de la noblesses arabes.”

(Extrait de The Last Punic War: Tunis past and Present.)

Arbre généalogique simplifié de la famille Ben Ayed de 1700 à nos jours

Arbre simplifié de la branche tuniso-djerbienne de la famille Ben Ayed

Après quelques années de recherche, nous avons réussi à reconstituer l’arbre généalogique de la branche tuniso-djerbienne des Ben Ayed de 1700 à nos jours.

Le père fondateur de la dynastie est Kacem Ben Ayed. Il est née vers 1700, il est originaire de l’île de Djerba. De simple commerçant, il gravit les échelons et remplit de nombreuses charges makhzéniennes pour devenir en 1758, le premier Caid de la famille. Son frère Ali en 1778 prendra la relève puis ses enfants Regeb, Ahmed et Hmida Ben Ayed succéderont à leur oncle.

Regeb Ben Ayed devient Caid du Cap Bon et grand douanier (décédé en 1800), Hmida Ben Ayed devient général de la cavalerie de l’Aradh et chargé des relations extérieures. Ahmed quant a lui occupera brièvement le poste de khasnadar puis s’exilera en Egypte à la suite d’un différend avec Ismail Bey, bey de camp sous Hamouda Bacha et qui finira par l’assassiner en Alexandrie. En plus de leurs fonctions, les frères Ben Ayed exercent des activités commerciales, et sont parmi les plus important armateurs corsaires de leur époque.

A la mort de Hmida Ben Ayed en 1817, ses enfants Younes, Salah, Said et Mohamed lui succèdent à la tête du caïdat de l’Aradh, mais c’est Mohamed qui se démarquera parmi ses frères et deviendra le chef de la famille Ben Ayed et l’un des hommes les plus influents de son temps.

En 1831 le Général Mohamed Ben Ayed, est nommé ambassadeur, il est envoyé en France pour le compte d’Hussein II Bey et c’est en cette qualité qu’il est présenté à Louis-Philippe, nouveau roi de France, par le consul Mathieu de Lesseps. Grâce à ses conseils, il évite in extremis une guerre entre la régence de Tunis et le Royaume de Sardaigne.

Le Général Mohamed Ben Ayed

À l’avènement d’Ahmed Ier Bey en 1837, il laisse progressivement sa place de principal conseiller du bey pour les opérations de commerce au profit de son fils cadet, le général Mahmoud Ben Ayed, progressiste et acquis aux nouvelles valeurs européennes. Mahmoud devient alors le chef de la famille, ses frères Abderahmen (mort en 1835) et Soliman se succéderont en tant que caid de Djerba.

Amrah du Bey de 1835 pour le prince Puckler Muskau se rendant dans le Sud Tunisien demandant au Caïd Soliman Ben Ayed de bien le recevoir.

A la suite de l’affaire Ben Ayed, Mahmoud s’exilera en France en 1852, son neveu par son frère Abderahmen, Hamida Ben Ayed lui succèdera et deviendra à son tour chef du clan Ben Ayed. Pour l’Histoire, l’année Boubarek en 1868, famine, invasion de sauterelles avec le choléra avait fauché en Tunisie 30000 personnes ! Le général Hamida Ben Ayed et sa famille avait mobilisés tous leurs moyens pour venir en aide au plus démunis, ils distribuèrent du pain et de l’huile, et achetèrent du grain, à Marseille, Naples et Tripoli. Les secours que la famille Ben Ayed avait prodigués aux nécessiteux se chiffrait par millions.

La famille Ben Ayed a également donné d’autres personnalités plus contemporaines, nous pouvons citer, Farhat Ben Ayed, qui fut garde des sceaux et l’un des fondateurs du parti Destour en 1920, le prince Adel Ben Ayed qui faillit accéder aux trône syrien, ou encore la princesse Khayriya Ben Ayed, qui fut la première femme du monde musulman à avoir publiée un ouvrage sur l’émancipation de la femme au début du XX ème siècle.  Nous pouvons encore citer Aly Ben Ayed, le célèbre acteur et metteur en scène, figure emblématique et père du théâtre tunisien, le professeur en Médecine Hassouna Ben Ayed maître incontesté de la médecine tunisienne, sans oublier l’homme d’affaire feu Hédi Ben Ayed qui dès 1954 fut précurseur et introduisit l’electro-ménager en Tunisie et bien d’autres personnalités.

Par Kais Ben Ayed