Kacem BEN AYED

Kacem Ben Ayed, le fondateur de la dynastie, pourrait avoir émigré de Jerba à Tunis au début du règne de Hussayn ben Ali. Il y rejoint la forte communauté d’immigrés insulaires qui, depuis le début du XVIIe siècle au moins, compte parmi les groupes commerciaux les plus actifs de la capitale. Les Jerbiens y avaient un souk et des institutions propres. Kacem Ben Ayed est doté d’une fortune moyenne, héritée de biens familiaux investis dans le commerce intérieur de la régence et dans le commerce du Levant. Par prudence, le jeune marchand reste à l’écart des conflits qui opposent Hussaynites* et Bachistes, entre 1728 et 1735. De la sorte, il a pu préserver ses affaires, si ce n’est les renforcer. Cette position de neutralité le distingue à nouveau lors des troubles de 1752. Néanmoins, Kacem Ben Ayed ne manque pas de sens politique. Il fait même preuve d’une grande habileté diplomatique quand il rejoint, à temps, le camp d’Ali Pacha en 1735, puis, en 1756, celui des fils de Hussayn ben Ali. Dès 1740, il a réussi à assumer des charges makhzéniennes, en tant que cheikh de la communauté de Jerba à Tunis. Son ralliement aux Hussaynites, en 1756, le propulse dans la sphère de la cour du Bardo. De simple marchand, il devient l’un des argentiers du bey et son financier. Deux ans plus tard, il est nommé caïd lazzam de l’île de Jerba. Il prend en affermage plusieurs autres « lismes » (dizma): celles du port de Tunis, des ancrages de bateaux, de la pêche maritime, de quelques forêts d’oliviers dans le cap Bon, etc. En parallèle, il est promu intendant de la flotte corsaire du bey. Kacem Ben Ayed assume ces différentes charges jusqu’à sa mort, en 1763. Ce cumul de fonctions et d’activités lucratives explique que les quatre fils de Kacem (Salah, Hmida, Rageb et Said) ont été très tôt initiés aux affaires. De même, ce dernier a dû prendre pour associé son frère Ali Ben Ayed qui, devenu son bras droit à la fin de sa vie, lui succède comme chef de famille, jusqu’en 1778.

Extrait de Les Arabes par leurs archives : XVIe-XXe siècles de J Cuoq 1977.

Sidi Kassem Ben Ayed, marchand moyen en 1748 ne se doutait guère qu’il allait être le fondateur d’une dynastie.

Nolisement de la Polacre appelée La Providence commandée par le capitaine Pierre Béranger en faveur de Sidy Kassem Ben Ayed et Ahmed Ahdiden.

L’an mille sept-cent quarante huit et le vingt troisième jour du mois d’octobre avant midi par devant nous chancelier du Consulat de France en cette ville et Royaume de Tunis soussignés et témoins sous nommés à été en sa personne le Capitaine Pierre Béranger de la Ciotat, commandant la Polacre appelée La Providence amarée actuellement en cette Rade de La Goulette, lequel de son gré a nolisé et nolise par ces présentes l’Estive et l’Entrepont de sa Polacre d’un parapet à l’autre du pont qu’elle se trouve à Sidy Kassem Ben Ayed et Ahmed Ahdiden, marchands maures ici présents et acceptant pour un voyage à faire de sortie de cette Rade de La Goulette aux Gerbis, à Modon et à Smyrne et le retour à Scio, aux Modon et en cette Rade de La Goulette ou le voyage sera fini et terminé et c’est aux conditions suivantes, à savoir que le capitaine aux nolisataires … à commencer d’aujourd’hui et vingt cinq jours de … à raison de trois sequins barbaresques par jour payables journellement, passé lequel le Capitaine pourra se mettre à la voile chargé ou non et les nolis lui seront toujours payés la veille pour le lendemain, le Capitaine se réserve la chambre dans laquelle il ne pourra mettre des marchandises pour son compte qu’après que les nolisataires auront chargé les bâtiments il se réserve aussi la Barde, les Soutes, la fosse au câbles, le chambron appartiendra aux nolisataires, qui embarqueront quinze passagers francs de nolis sur la couverte des nolisataires. Le présent nolissement pour le seul voyage en faire et passé pour le prix et la somme de six cent soixante sequins barbaresques et cinq … pour le Capitaine tous de poids, de bon or sans trous payables et avoir la moitié à Smyrne …

Signatures:

Louis Villet

Ahmed Ahdiden

Kassem Ben Ayed

Deflandre

Pierre Béranger

Sidi Kassem Ben Ayed s’embarquait les années 1748 et 1749 (40 ans avant la révolution française) avec Ahmed Ahdiden sur la Providence à destination de Smyrne (Turquie) et Chio (Grèce). Le voici en 1750, avec le nommé Gio Angelo Capriata, négociant génois, nolisant le Saint-Jean commandé par le capitaine Jean Raynard qui les conduira à Cagliari (Italie) puis à Marseille (France) pour le commerce. Les bases de la fondation d’une dynastie sont posées.

Nolisement de la Tartane Saint-Jean commandée par le capitaine Jean Raynard en faveur de Jean Ange Capriata et de Kassem Ben Hayer (Ayed)

L’an mil sept cent cinquante et le cinquième jour du mois de Mars avant midy, par devant nous chancelier du Consulat de France en cette ville et Royaume deTunis soussignés et témoins sous nommés en comparu le capitaine Jean Raynard d’Agde commandant la Tartane appelée Saint-Jean actuellement ancrée en cette rade de la Goulette lequel de son gré en a nolisé et nolise par le présent, l’Estive d’un paraper à l’autre de la portée qu’elle se trouve au Sieur Jean Ange Capriata marchand génois et au nommé Kassem Ben Hayer (ayed) marchand maure de cette ville, tous les deux icy présents stipulant et acceptant pour un voyage à faire de sortie de cette rade de la Goulette à Marseille ou ce voyage sera fini et terminé aux conditions suivantes à savoir que le capitaine accorde à ses nolisataires trente jours courants d’Estarie en tous lequels commenceront à compter samedy prochain septième du courant mois et quinze jours de surestarie si besoin est à raison de deux sequins et demy barbaresques par jour payables journellement passé lequel temps le capitaine pourra se mettre à la voile chargé ou non et les nolis luy seront toujours payés le vide pour le plein le capitaine se réserve la chambre dans laquelle logera néanmoins trois passagers au gré des nolisataires et toutes les cloisons ordinaires pour les vivres et câbles, il se réserve également la portée de deux cent quintaux de marchandises lesquelles seront procées de quelques natures q’elles soient dans l’Estive du bâtiment. En mer le dit capitaine relachera à Calliery ou donnera deux jours à ses nolisataires pour y débarquer un des passagers lequel payera tous les frais occasionner par la relache du bâtiment au dit jour. Les frais concernant le bâtiment comme assurage et avarie seront payés par le dit capitaine et tous ceux occasionner par la marchandise comme arrimage bateaux pour l’embarquement et débarquement et autres généralement quelconques seront supporter par le di nolisataire. Le présent nolisement pour le prix du voyage et fait et passé le prix et somme de six cent quarante écus monaye de Sardaigne que le di nolisataires promettent et obligent judiciairement de payer à Marseille au capitaine quinze jours après la quarantaine du bâtiment pour le prix de quatre livres dix sols tournois pour chacun des … en paix et sans difficulté ainsi d’accord entre les parties lesquelles pour l’observation du contenu au présent acte oblige leurs biens présents et à venir à toutes leurs justice requises et conjure. Fait et publié au dit Tunis en chancellerie en présence des sieurs Jacques Viller et Louis Crozet négociants français résident en cette ville, témoins requis qppeler et soussigné avec les parties et.nous chancelier au présent original.

Signés Hajj Mohamed Guechai

Kassem Ben Ayed

Jacques Viller

Louis Crozet

Valliére

Gio Angelo Capriata.

Kassem Ben Ayed est Grand Douanier de Tunis en 1760. Il meurt en 1763.