L’indétronable Ali Ben Ayed

Il y a des personnes qui ont marqués l’Histoire de Tunisie et Aly Ben Ayed ( علي بن عياد ) en fait inévitablement parti. Ali Ben Ayed est né le 15 août 1930 à Tunis. Il appartient à l’une des plus illustres familles de notables tunisiens, originaires de l’île de Djerba; le Général Mohamed Ben Ayed et les Professeurs Hassouna Ben Ayed et Farhat Ben Ayed en font aussi partie. Dès son plus jeune âge Aly Ben Ayed montera sur les planches alors qu’il n’est encore qu’élève à l’école primaire. Il fera ses études secondaires au Collège Sadiki et partira d’abord en France, où il s’inscrira au Conservatoire de Paris et s’intéressera aux cours donnés par René Simon. En 1955, il se rendra au Caire afin de suivre les cours du Centre des hautes études dramatiques. En 1956, il retournera à Paris pour suivre un stage de mise en scène et d’éclairage au Théâtre national populaire. En 1958, il rejoint la troupe municipale de Tunis en tant que directeur adjoint de Mohamed Agrebi. Enfin en 1960, il fera un voyage d’études aux États-Unis.

Ali Ben Ayed ne cessera de prendre une part active à la création et à la mise en scène de pièces du répertoire tunisien et mondial où il campera généralement le premier rôle. Il fera ainsi sa première apparition cinématographique en 1952 dans Le voyage d’Abdallah. Parallèlement, il s’intéressera à la radio en produisant de nombreuses émissions inspirées de la crise de Bizerte.

Zoubeir Turki, Habib Boulares et Aly Ben Ayed, lors de la création de la pièce de théâtre Mourad III.

La troupe municipale de Tunis.

En Septembre 1962, après avoir été l’adjoint de Mohamed El-Agrebi et Hassen Zmerli, Aly Ben Ayed prendra la direction de la troupe. Il amorcera une série de réformes qui dotent la compagnie d’un embryon de statut. Les salaires sont augmentés, la troupe est rajeunie et renforcée, elle passera de 20 à 40 comédiens, les cachets de représentations seront désormais instaurés. De 1963 à 1970, la troupe est à son apogée. Elle fera parvenir le théâtre tunisien aux sommets de la gloire pour ne citer que les plus importantes réalisation nous ne citerons que « Caligula », «Mourad III», «Yerma », «Othello », «Œdipe Roi» … La renommée de la Troupe Municipale dépasse les frontières tunisiennes, et les représentation se font à Paris, à Alger, à Baâlbek, ou à Rabat … Cette période de succès marquera d’une pierre blanche l’édifice du théâtre tunisien. Aly Ben Ayed aura marqué à jamais de son empreinte personnelle La «Troupe Municipale de Tunis» .

Le président Habib Bourguiba, Anissa Lotfi, Mohamed Mohsen Ben Abdallah, Salwa Abdou, Habiba Toumi, et Aly ben ayed.

Quelques images de Caligula (Avril 1963, Tunisie)

Son dernier voyage

Ali Ben Ayed discutant avec des jeunes.

Il part pour Paris, le 9 février 1972, pour mettre les dernières retouches à une pièce traitant de la révolution palestinienne. Il sera victime d’une hémorragie cérébrale au domicile de la princesse Zubeida Ben Ayed, le 12 février, il mourra deux jours plus tard à l’âge de 41 ans. Il sera rapatrié en Tunisie, son corps sera inhumé au cimetière du Djellaz le 17 février 1972.

Première session des JCC 1966, M.Chedli Klibi en compagnie de son épouse Mme Kalthoum Lasram, M. Ali Ben Ayed et M. Mohamed Mohsen Ben Abdallah 

Aujourd’hui, le festival de Hammam-Lif et une rue de Tunis porte son nom en son hommage

Par Kais Ben Ayed

Un Tunisien à la cour du Roi Louis Phillipe de France en 1831

Au lendemain de la prise d’Alger le 5 juillet 1830, l’armée française, malgré la puissance du corps expéditionnaire (450 navires dont plus de 100 bâtiments de guerre,83pièces d’artillerie de siège, 27 000 marins, 37 000 soldats), se trouva confrontée à des difficultés à tenir le territoire algérien. Face à ces difficultés, l’idée de placer une partie du territoire sous l’autorité du bey de Tunis germa ainsi dans l’esprit du général Clauzel, commandant en chef de l’armée d’Afrique (août 1830-février 1831). Ces problèmes liés à la conquête avaient conduit Clauzel à songer à créer une sorte d’Etat musulman dans les beyliks de Constantine et d’Oran que l’on confierait à des princes tunisiens en contrepartie du paiement d’un tribut comme gage de vassalité à l’égard de la France. Des pourparlers de négociations ont alors étaient entamés entre la France et le Royaume de Tunis. C’est le Général Mohamed Ben Ayed munit des pleins pouvoirs qui sera choisit par Hussein Bey pour le représenter au près du Roi des Français Louis-Phillipe. Les pourparlers se termineront par un refus du Roi français estimant que les accords n’était pas en faveur de la France.

Le Général Mohamed Ben Ayed lors de son ambassade au près du Roi Louis-Phillipe en 1846.

Le Général Ben Ayed au Bal des Tuileries.

Après un long voyage de Tunis à Paris qui avait duré plusieurs mois, le général était convié à un bal aux Tuileries. Depuis quelques jours on parlait des magnifiques préparatifs de ce bal, et l’on enviait dans les salons de la capitales le plaisir des personnes invitées à cette fête qui devait, disait-on à l’avance, surpasser par son éclat les bals précédents. La soirée du mercredi arrive enfin, les équipages se pressent dans la cour des tuileries, les salles se remplissent, et l’on voit les uniformes brillants d’or ou d’argent se mêler à des toilettes resplendissantes de fleurs et pierreries. Cette réunion offrait un mélange de toutes les classes de citoyens, de pairs et de députés, d’officiers de l’armée, de la garde nationale et aussi de simple gardes nationaux, les personnages étrangers fixèrent bientôt l’attention; les regards se portaient sur l’envoyé de Tunis le Général Sidi Mohamed Ben Ayed, remarquable par la physionomie immobile d’une superbe tête et revêtu d’un manteau africain drapé à l’orientale, lorsque les costumes hongrois des fils de M. d’Appony vinrent éblouir les yeux par leur richesse et contraster avec la simplicité de notre milice citoyenne.

Récit du Comte D’Appony.

Le comte D’Appony.

“Au dernier concert à la Cour, je me suis trouvé debout à côté du Roi, le Dey d’Alger se trouvait non loin de nous.
C’est incroyable, me dit Sa Majesté, tout ce qu’on voit de nos jours voilà le Dey d’Alger à la Cour du Roi de France.
– Je viens de faire la même réflexion, Sire.
– Peut-être, continua Sa Majesté, dira-t-il comme le doge de Gênes a Louis XIV «Ce qui m’étonne le plus, c’est de m’y voir. »
Je souris et me tus. Le ministre d’Argout, meilleur courtisan que moi, prit la parole et dit au Roi:
– Le doge de Gênes avait raison de le dire, mais quelle différence entre le siècle despote de Louis XIV et celui d’aujourd’hui ! Les étrangers voient chez nous des choses bien plus utiles et plus étonnantes que le château de Versailles. Je crois donc que le dey d’Alger n’a jamais dit et pas même pensé pareille chose.
– Je l’espère, dit le Roi avec un air satisfait.
Et l’on changea de conversation. Le dey d’Alger avait avec lui, outre son interprète, un homme grand, à larges épaules, à la figure noire, sévère et pittoresque. L’interprète nous dit que c’était le Bourreau honoraire du dey.
En fait de personnages curieux, il y avait encore, à ce concert, l’envoyé de Tunis, avec sa grande couverture de laine blanche, dans laquelle il est enveloppé de la tête aux pieds, et son neveu, charmant garçon de dix à douze ans avec des yeux noirs de toute beauté.

Un autre jour le Comte d’Apponyi nous raconte: “Au moment où j’entrais dans la salle du trône, j’aperçus de loin la belle duchesse de Vallombrosa que je n’avais pas encore vue depuis son mariage, et je voulus m’approcher d’elle pour lui faire mes compliments. Ne voilà-t-il pas que ce grand bourreau de Turc me barre le chemin de concert avec son maître. Moi, ne pensant pas plus aux Turcs en ce moment qu’au Grand Mogol, l’aspect de tous ces turbans et poignards (l’envoyé de Tunis s’y trouvant aussi avec son neveu) me fit reculer de trois pas au moins; ces messieurs en profitèrent pour me faire des révérences jusqu’à terre; j’en fis de même, en les imitant, ce qui fit sourire les dames qui nous entouraient...”

Le Général Mahmoud Ben Aiad en tenue tribal par E. DELACROIX.

Le présent article a pour objet de retranscrire des documents authentiques et inédits dans la plupart sont conservés aux archives nationales tunisiennes de la mission du Général Mohamed Ben Ayed.

Hussein Bey à Clauzel. Le7 mars 1831.

Nous avons accepté vos propositions relatives à la province d’Oran, malgré les lourdes charges qui en résulte, pour nous. Nous avons consenti ces sacrifices, comme vous le savez, en raison des communications venues de France et afin de respecter votre parole et de sauvegarder votre prestige, inspiré que nous étions par notre amitié sincère. De votre côté et au nom de cette même amitié, vous devez déployer tous vos efforts pour que les clauses relatives à Oran soient admises dans les conditions que celles de Constantine, puisque nous avons, pour notre part, acceptés comme telles, conformément à vos désir. Il vous appartient donc de faire adopter par la France les accords que nous avons conclus. Nous sommes du reste convaincu que la France n’acceptera jamais que nous soyons lésé; sa politique traditionnelle et son amitié nous en sont garantes.

Nous avons décidé d’envoyer prochainement auprès du gouvernement français, le respectable, très-accompli et très sage, notre fils Mohamed Ben Ayed, l’un des meilleurs serviteurs de notre gouvernement. Il aura mission de discuter les conditions proposées par votre gouvernement et il sera muni de la lettre adressée par vous au Ministre, à ce sujet. En la chargeant de cette mission, nous sommes sûr que votre amitié vous dictera de le seconder efficacement dans le but de l’accomplir convenablement. Nous sommes tranquille sur ce point, sachant que nous pouvons compter sur vos efforts dans le sens de nos intérêts communs…

Image:Hussein II Bey.jpg
Hussein Pacha Bey.

Clauzel à Hussein Bey. Le 8 Avril 1831.

Prince,

j’ai reçu la lettre que votre Altesse m’a fait l’honneur de m’écrire. Les explications verbales et écrites que j’ai données à mon gouvernement ont levé toutes les difficultés qui s’étaient élevées au sujet des conventions que j’ai conclues avec vous pour les Beyliks de Constantine et d’Oran. Ces conventions seront soumises seulement à une nouvelle rédaction qui sans rien changer aux stipulations leur
donnera une nouvelle garantie; en attendant vous devez continuer à exécuter ce qui a été convenu et vous ne trouverez aucun obstacle de la part de l’autorité française. J’ai prévenu mon gouvernement de la prochaine arrivée à Paris de Sidi Mohamed Ben Ayed que vous me dites avoir désigné pour remplir cette mission. Il sera reçu avec les égard dus à l’envoyé d’un prince ami sincère de la France et votre Altesse peut compter qu’en mon particulier je m’empresserai de faire tout ce qui dépendra de moi pour faciliter le succès de sa mission et lui prouver le cas que je fais de votre amitié.

Je prie votre Altesse d’agréer l’hommage de mon respect.


Le lieutenant Général Compte Clauzel
Paris, 8 avril 1831.

François de Gairouis à Hussein Bey.

Marseille Du 17 avril 1831

Expédition d’Afrique
Subsistances Militaires F.A.S

Altesse Royale,

Le lieutenant Général Clauzel m’a adressé la dépêche ci-jointe avec ordre de la faire parvenir à V.A par première occasion: je m’empresse de profiter de celle d’un navire qui partira demain pour Tunis pour faire cet envoi à V.A.

Sidi Mohamed Ben Ayed qui est entré dans le Lazaret il y a deux jours, sera reçu à sa sortie par ma maison de Marseille et de Paris avec les égard et les attentions qu’un envoyé de V.A mérite : Les respects et tous les services que nous rendrons à Sidi Mohamed, nous les considérons comme rendus personnellement à V.A.
Je supplie votre V.A. de vouloir bien agréer la nouvelle assurance du profond respect et du dévouement de son très humble et très obéissant serviteur.

François de Gairouis

Notes Clauzel du 4 Mai 1831.

“Note Clauzel” du 4 mai 1831.
Le maréchal de France Clauzel.

A Son Altesse Hussein Pacha, Bey de Tunis.

Du 15 Mai 1831

Prince,

J’ai reçu la lettre que Votre Altesse m’a fait l’honneur de m’écrire le 23 -ème jour du Ramadan et je le remercie des témoignages nouveaux qu’Elle me donne de sa précieuse amitié.

J’ai lu avec intérêt et satisfaction les détails que Votre Altesse me donne sur les mesures qu’Elle a prises pour assurer l’exécution des stipulations conclues au sujet du Beylik de Constantine, et je ne doute pas qu’elles ne soient couronnées d’un plein succès.

Je suis heureux d’avoir à vous confirmer ce que je vous ai fait, savoir que le Gouvernement français approuve pleinement les bases de nos conventions de votre Altesse a fait preuve de discernement en comptant qu’elles auraient leur plein et entier effet. Il en est de même de nos arrangements relatifs à Oran.

Le respectable envoyé qui va à Paris de la part de Votre Altesse recevra de moi l’accueil que je réserve à toutes les personnes que vous honorerez de votre bienveillance et je lui prêterai tout l’appui qui dépendra de moi pour la réussite de sa mission.

Je serai probablement de retour à Alger dans le courant du mois d’Octobre et je me ferai plaisir de rendre plus fréquentes mes relations avec vous. Je présente à Votre Altesse le nouvel hommage de mon respect.

Ecrit à Paris, le 8 mai 1831.

Le Lieutenant Général
Signé: Clauzel

PS: J’apprends avec plaisir à Votre Altesse que ma demande les ministres de la guerre et de la marine ont ordonné qu’il fut fait une expédition sur Stora pour faciliter les opérations sur Constantine et procurer une diversion avantageuse.

Signé: Clauzel.

François de Gairouis.

Marseille le 15 Mai 1831

Excellence,

Le Lieutenant Général Clauzel m’a adressé avec ordre de la remettre moi-même la lettre pour Son Altesse le Pacha Bey, dont j’ai l’honneur de remettre l’original à S.A très prochainement. Le général m’écrit qu’il attend Sidi Mohamed Ben Ayed à Paris avant de partir pour ses terres; il contribuera puissamment au succès de sa mission.

Sidi Mohamed partira le 18 courant avec Sidi Hassouna et mettra douze jours à faire son voyage. J’aurais accompagné jusqu’à Paris Sidi Mohamed si j’en n’avais été bien sûr qu’il sera reçu on ne peut plus honorablement par les personnes à qui je me fais un plaisir de le recommander; et je me doute nullement du succès de sa mission à laquelle je m’honorerai d’avoir contribué: je l’ai fait avec d’autant plus de satisfaction, que je reconnais les réclamations de S.A. comme très fondées et que j’ai cru dire quelque chose qui pourrait être agréable à S.A. ainsi qu’à votre Excellence.

Veuillez agréer, Excellence, la nouvelle assurance de mon respect et de mon dévouement.


François de Gairouis.

A son Altesse le Prince Bey de Tunis.

Du 21 octobre 1831.

Magnifique Seigneur,

je remet à Sidi Ben Ayed, votre envoyé en France, avec la présente dépêche, exemplaire du mémoire que je viens de faire imprimer, et où Votre Altesse verra que je suis toujours ferme dans les arrangements que j’ai fait avec elle, et que me loue de toutes les relations que j’ai eues avec Sa cour.

J’espère que Votre Altesse verra que je suis toujours ferme dans les arrangements que j’ai faits avec elle, et que je me loue de toutes les relations que j’ai eues avec Sa cour. J’espère que Votre Altesse y trouvera un nouveau témoignages des hauts sentiments qu’elle m’a inspirés.

Je la prie d’agréer l’hommage du respect avec lequel je me dis, de Votre Altesse, Magnifique Seigneur.


Le très humble et très obéissant serviteur,
Le maréchal de France,
Clauzel.

Le Général Sidi Mohamed sera envoyé une deuxième fois en France en tant que ambassadeur de Ahmed Bey en 1846.

Par Kais Ben Ayed

Le Touring Race Budapest – Constantinople by Ben Ayed

Entre le 29 juin et le 6 juillet 1912, le Royal Automobile Club Hongrois organisait un Touring race sous la présidence du Prince Tuniso-turque Rchid Ben Ayed (arrière-petit fils du Général Mohamed Ben Ayed), dans laquelle pas moins de vingt cinq voitures sportives et une soixantaine de personnes traversaient les Balkans de Budapest à Constantinople.

Parcours du Touring Race Budapest Constantinople. Départ de Budapest en passant par Klausenberg(Cluj Napoca), Hermaanstadt, Bucarest, Ruse, Tirnova, Edirne, puis Istanbul.

Le parcours d’environ 2000 km traversait l’Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie et enfin la Turquie. Cet événement rassemblait des pilotes de diverses nationalités, des Hongrois, des Autrichiens, des Suisses, des Allemands et même un Américain. Différentes marques de l’époque était également représentées, dont Mercedes, Minerva-Knight, Benz, Opel, Packard, Fiat, Berliet, Llyod, De Dion-Bouton, Rex-Simplex, Charron, Puch, et Renault. Il est à noter qu’au début du 20-ème siècle le meilleur moyen de promouvoir la fiabilité de ces nouveaux engins appelés automobiles était d’organiser des compétitions de longues distances.

Le prince Rchid Ben Ayed avait organisé ce stratagème marketing à l’époque pour tenter de relancer le Yalova Thermal Bath dont il était l’exploitant en plein conflit balkanique, qui a été le prélude à la première guerre mondiale.

Découvrons des images rares de cette compétitions de 1912.

Par Kais Ben Ayed

Conte populaire tunisien: Les sept petites filles et l’ogresse

Un conte populaire tunisien exceptionnel de 1960, 15 minutes de pur plaisir réalisé dans les studios de la radio tunisienne, adapté par Pierre Comte, avec : Mohamed Agrabi dans rôle du conteur , Pierre Comte dans le rôle de l’ogresse, Ali Ben Ayed dans le rôle du père , Jamil Joudi dans le rôle du crieur, R. B. Ayed, A. B. Ayed, Raouf Zarrouk, F. Azouz, et dans le rôle des petites filles, Latifa, Zohra, Amina, Aza, et le petit chien Zenada: Charles Deschamps, réalisation de Claire Herselin, sous la direction artistiques de Max De Rieux.

Les huileries Ben Ayed à travers le temps.

D’une huilerie souterraine de la fin du 18 -ème siècle à une huilerie moderne du début 20 -ème, les Ben Ayed ont su s’adapter à leur environnement et à la technologie de chaque époque.

L’huilerie souterraine du Palais Ben Ayed.

Le clan Ben Ayed possédait de nombreux oliviers à Djerba, cet arbre était le symbole de prospérité et de richesse. Les Ben Ayed étaient les principaux exportateurs d’huile d’olive entre la fin du 18 et le début du 19 -ème siècle.

Huilerie souterraine Ben Ayed. Coupe AA

Ce n’est pas étonnant de trouver non loin du palais Ben Ayed de Sedghiane, une huilerie souterraine. Ces édifices était jadis construits en sous-sol creusés dans de la roche ou dans l’argile. La construction en sous-sol permettait de maintenir l’huile d’olive à une température adéquate. L’huilerie se composait de trois espace principaux, le premier destiné au stockage, le second constitué d’une chambre de pressoir et enfin une chambre de purification. On remarque que l’huilerie Ben Ayed disposait d’espaces de stockages supplémentaires témoignage d’une forte production à l’époque.

Huilerie souterraine Ben Ayed. (Coupe BB et CC)

On accédait à l’huilerie souterraine par un large couloir en escalier, ce couloir était aménagé postérieurement à l’huilerie et il devait permettre le passage d’un dromadaire chargé d’olive. La récolte d’olives était ensuite jetées sous la meule qui était mise en mouvement par une éparre à laquelle on attelait un dromadaire, dont les yeux étaient couverts de deux petits paniers ronds en alfa tressé afin de lui éviter d’être étourdi en tournant toujours dans le même sens. L’huile était ensuite recueillie dans de grande jarre.

Plan de l’huilerie souterraine Ben Ayed.

Aujourd’hui l’huilerie souterraine a entièrement été recouverte, cependant il est toujours possible de la désenterré et de la refaire vivre.

Huilerie Mustapha Ben Ayed & CO en 1926.

Si Mustapha Ben Ayed (descendant directe de la dynastie des caïds Ben Ayed) avec certains associés furent les premiers fondateurs de l’huilerie moderne à Djerba en 1926. Cette huilerie fut pendant longtemps l’une des meilleures huileries de Djerba et jouissait d’une grande réputation.

Stockage des olives.
Pressoir de l’huilerie fondée par Si Mustapha Ben Ayed & CO en 1926.
Pressoir hydraulique de marque française.
Meule en granite – Huilerie Mustapha Ben Ayed & CO.
Meule – Huilerie Mustapha Ben Ayed – 1926.
Moteur 16 chevaux qui faisaient tourner les pressoirs.
Support des courroies que faisait tourner le moteur – Huilerie Mustapha Ben Ayed & CO. 1926.

L’huilerie Mustapha Ben Ayed & Co disposait d’un groupe électrogène pour l’alimentation en électricité qui était à l’époque chose rare sur l’île de Djerba. Si Mustapha, avait pour associés les Ben Younes, les Bel Hadj Yahia, les Agar et enfin les Ben Mouala, malheureusement l’huilerie est aujourd’hui en état de délabrement.

Image d’une huilerie souterraine à Djerba par Charles Lallemand. Relevé architecturaux de l’Huilerie Ben Ayed site de l’ASSIDJE. www.assidje.tn

Par Kais BEN AYED

Février 1783: Si Redgeb Ben Ayed est nommé Grand Douanier de Tunis.

Si Redgeb Ben Kacem Ben Ayed, (frère du Général et Caïd de l’Aradh Hmida Ben Ayed) était été proche du Ministre Mustapha Khouja et des milieux du négoce pro-français : il servait à la fois de financier au bey et de fermier des douanes portuaires. Il est nommé caïd du cap Bon de 1779 à 1800, l’année de sa mort. Son fils Si Mustapha Ben Ayed lui succédera dans cette charge de 1800 à 1805.
Les frères Redgeb et Hmida Ben Ayed sont les fondateurs de la successions de Palais à Djerba Cedghiane, et à Tunis Bab Jdid. Si Regdeb sera nommé le 2 février 1783 par Hamouda Pacha Grand Douanier de Tunis comme en témoigne la lettre suivante, postes que son oncle Ali Ben Ayed avait préalablement occupés:

“D’ESPARRON AU MARQUIS DE CASTRIES.

Tunis, 2 février· 1783. – La fuite de Sidi Ismail n’a fait aucune sensation au Bardo et n’a eu d’autre effet que d’affermir encore le crédit de Sidi Mustapha. Cette fuite est une perte pour la nation, qui n’a eu qu’à se louer de Sidi Ismail en sa qualité de grand Douanier.


Le Bey a disposé de celte place en faveur de Sidi Ben Ayed, qui jouit de la considération publique. Le sieur d’Esparron a rendu visite à ce nouveau Douanier, qu’il a trouvé fort bien disposé pour la nation française.

(Affaires Etrangères Consulat de Tunis.)”

Charles Eugène Gabriel de La Croix de Castries.

Dans une seconde lettre du Consul Général Devoize à Talleyrand, Devoize décrit Si Redgeb comme “un estimable musulman qui a montré des sentiments humains pour les esclaves français”. Son neveu Si Mohamed Ben Ayed en héritera puisqu’il jouera un rôle primordiale avec le consul général Sir Thomas Reade dans l’abolition de l’esclavage en Tunisie.

Jacques-Philippe DEVOIZE, Consul Général de France en Tunisie

“DEVOIZE A TALLEYRAND.

Tunis, 20 septembre 1800. – … Le Sahib-Tapa, favori du Bey, se montre jaloux de bien mériter du gouvernement de la République par ses bons offices auprès de son maitre. Il me témoigne amitié et confiance … »

Devoize demande à Talleyrand quelques cadeaux pour le Sahib-Tapa:
une boite d’or à charnière, enrichie de quelques diamants, du prix d’environ 1OO louis; pour le premier ministre et beau-frère du Bey, pour le Bey, pour Mariano Stinca, secrétaire particulier de ce Prince pour la correspondance italienne, qui, sans cesse auprès du Bey, a tous les moyens de nuire et de servir »; pour les grands écrivains, pour les officiers du Bey, pour Sidi Redjeb Ben Ayed, Grand douanier, « un estimable musulman qui a montré des sentiments humains pour
les esclaves français » Les Anglais versent l’or à pleines mains, et ce n’est pas tant pour leurs intérêts que dans la vue de nuire aux nôtres.

(Affaires Etrangères Consulat de Tunis.)  »

Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord , Ministre français des Relations-Extérieures .
Par Kais Ben Ayed

La mille deuxième nuit d’Orient

C’est dans le cadre très oriental d’un des plus anciens palais de Tunis que se déroula la mille et deuxième nuit qui nous avait été offert, le palais Ben Ayed, une demeure séculaire, (construit au XVIII ème siècle par les frères Regeb, Grand Douanier de Tunis et Hmida Ben Ayed, Général et Caïd de l’Aradh) aux murs couverts de mosaïques, un palais comme en rêve enfant quand on a lu Ali baba et dans lequel, sur des patios embaumés et d’où monte la fraicheur des eaux jaillissantes, s’ouvrent de vastes pièces, riches d’un décor du style le plus pur, en arabesques et en enluminures. Et dans l’une de ces vastes salles du Palais Ben Ayed, une salle à l’échelle de ses murs gigantesques, lampes, aiguières, meubles, tableaux, le cercle des invités resserrait son étreinte autour d’une estrade enchantée.

Palais Ben Ayed de Tunis.


Une demi-douzaine de danseuses houris de choix et almées de grand styles parmi elles Habiba Messika, Babia Chamia, Dalila, Ratiba. Elles étaient couvertes de pierres et de bijoux, revêtues de soieries somptueuses, et dont le feu sombre du regard rivalisait avec l’éclat de leurs diamants, exécutèrent avec beaucoup de grâce, au son des tambourins, de l’harmonium et des violons, des danses mêlées de chansons;

Elles mimèrent l’amour. Le voluptueux Orient donnait aux belles invitées car tout ce que Tunis compte de jolies femmes était là, un sourire ambigu, cependant que les habits noirs et les burnous devenaient sérieux. Le sensuel Orient ondulait sur un ventre de femme, qui glissait sur des bras nus cerclés d’or, tenait tout entier dans une mélopée lancinante, évocatrice d’insatiables amours.

Puis ainsi qu’il est dit dans les récits des vieux contes arabes, dans d’autres salles voisines, à la cadence assourdissante et barbare du tamtam dont le rythme allait s’accélérant, une poignée de Soudanais, hommes et femmes, ricanaient et menaient une ronde frénétique du plus saisissant effet.

Extrait du journal “Le Siècle” 1927. Gros.

Par Kais Ben Ayed

Sofrat Ben Ayed – سفرة بن عياد

Le luxe inouï des Ben Ayed donna lieu à des légendes qui circulèrent, dans toute l’Afrique du Nord. Leur richesse qui dépassait, dit-on, la fortune beylicale, donna lieu à un faste légendaire dont la fameuse « sofrat Ben Ayed » (سفرة بن عياد) qui demeure le souvenir populaire le plus célèbre.

Sofrat en arabe “سفرة” signifie table ou buffet. Celle de Ben Ayed était grandiose, riche aussi bien en différents mets, qu’en vaisselles et service de tables, que toutes ses convives restaient bouche-bée.

On retrouve de nombreuses traces de Sofrat Ben Ayed (سفرة بن عياد) dans de nombreux livres ou lettres comme en témoigne la lettre ci-dessous (lettre manuscrite d’Ahmed Ibn Dhiaf). Ahmed Bey aimait les mets et desserts préparés pour Ben Ayed, il lui demande dans cette de lui ramener le diner, le dessert notamment les “mkharek” , la “Zlebia”, et la “madmouja” comme à son habitude pour passer la nuit au Palais Beylicale de la Mhamdia. On peut également mentionner les « briks » (beignets à l’œuf) de Ben Ayed qui étaient l’un des mets préférés d’Ahmed Bey.

Lettre de Ahmed Bey 1er au Caïd Mahmoud Ben Ayed en Juillet 1849.


لحمد لله،
الهمام المقرب الثقة الأحضى الأرضى الأعز أمير اللواء ابننا محمود بن عياد حرسه الله أما بعد السلام عليكم و رحمة الله فانك تخلفت عن القدوم الى المحمدية مدة و تحيرنا من ذلك و المانع خير ان شاء الله و أعلم أنه غدا ليلة الخميس المبيت عندنا بالمحمدية على العادة الدايمة ان شاء الله فاقدم و لا تتخلف الا لعذر و عافاكم الله و ابعث الزلابية و المخارق و المدموجة و العشا مثل العادة و دمتم في أمن الله.
و السلام،
من الفقير الى ربه تعالى عبده المشير أحمد باشا باي وقيه الله آمين و كتب ليلة الأربعاء 11 رمضان 

Sir Wemyss Reid nous fait également une excellente description de ce que pouvait être Sofrat Ben Ayed (سفرة بن عياد) dans son livre “The Land of the Bey” lorsqu’il était convié à diner chez Ben Ayed « C’était un repas vraiment somptueux, presque tous les plats étaient cependant arabes. Nous avons commencé avec un délicieux couscous; puis vint, la boutargue, des œufs séchés de mulets rouges. Cette délicatesse, qui est faite à Bizerte, ressemble quelque peu au caviar, mais sans le caractère gras de ce dernier. Olives, radis, etc., étaient également en accompagnement. Ensuite, un autre plat arabe était servi, ce qui, … celui se composait de beignets chauds et gras, contenant de la viande et des œufs; puis vint du poulet froid servi avec une sorte de pâte à l’œuf, très légère et délicate; puis un excellent mouton rôti; du foie gras en aspic, et enfin un des plus bel assortiment de pâtisseries et de bonbons pour clôturer cette partie du repas. Je devrais mentionner ici que les bonbons et les pâtisseries étaient d’origine arabe et non italienne, et étaient les plus délicieusement parfumés à la pistache. Melons, grenades, et d’autres fruits exquis étaient servis après le repas”

Une autre version de Sofret Ben Ayad (سفرة بن عياد)

L’autre version de Sofrat Ben Ayed (سفرة بن عياد) serait que l’un des Beys ayant besoin de finance se rendit chez Ben Ayed. Ce dernier bien renseignée avait préalablement l’information de la venue du Bey, il avait fait préparé un diner spécial pour celui-ci. En passant à table le Bey et ses accompagnants furent éblouis par la richesse du service de table chez Ben Ayed, et lorsqu’ils entrouvrirent les soupières et autres vaisselles ils furent encore plus surpris de découvrirent le contenu, des pierres précieuses en tout genre, de l’or et des pièces de joaillerie rares avaient remplacés la nourriture. “Servez-vous !” dit Ben Ayed. Ils prirent ce qu’ils purent prendre, et en contrepartie le Bey demanda à Ben Ayed de lui demandait une faveur. Ben Ayed demanda que l’air (الهوي) de Tunis lui soit vendu. Le Bey étonné de cette demande l’accepta. On raconte que le lendemain Ben Ayed avait crée une nouvelle taxe qui était calculée en fonction du nombres d’ouvertures de chaque demeures.

Ils sembleraient que cette passion d’éblouir les invités se soient transmises de nos jours à l’une des descendantes des Ben Ayed, Mme. Alya Baccouche Ben Said auteur du livre Passions tables dans lequel nous pourrons admirer les tables les unes plus belles que les autres.

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Couverture de Passions Tables. Alya Baccouche Ben Said.

Crédit Photos Mme. Alya Baccouche Ben Said. Lettre communiquée d’Ahmed Bey à Ben Ayed par M. L. Khemira.

Par Kais Ben Ayed

Baudin : le prélude à l’affaire Ben Ayed.

Comment la France par ses brouilleries et l’art de la manipulation a t’elle précipitée la chute de Mahmoud Ben Ayed ? La France a jouée un double jeu avec Ben Ayed, elle a d’abord commencée à le discréditer auprès d’Ahmed Bey tout en lui proposant sa protection et lui laissant ainsi, peu à peu le champs libre.

Le prélude à cette affaire a été la visite de l’Amiral Baudin en Tunisie, en novembre 1848, à cause d’un navire, le Jemmapes, retenu en rade de la Goulette durant quelques jours que l’amiral Baudin recherchait activement.

Portrait de l’Amiral français Charles Baudin.

Dans la gazette du Midi du 19 novembre 1848, nous pouvons nous faire une idée de la visite de cet amiral français et des manœuvres utilisées à l’époque.

“Les Ben Ayed, père et fils, ont fait la paix. Quand ces gens-là se réconcilient, gare nos intérêts. Nous avons toujours pensé, nous vous l’avons écrit, que ces différends, ces brouilleries étaient valeur entendue. Malgré le peu d’estime que le fils inspire généralement, il nous a toujours répugné à croire à tant de perversité. Sa conduite envers son père ne nous a jamais paru bien sérieuse. Ces gens-là n’ont aucune de nos idées sur l’honneur, la probité, l’amour propre; il ne connaissent que l’argent; aussi, croit-on qu’ils ont agi de concert et n’ont pas craint de s’attaquer sans ménagement, en apparence, pour sauver de la rapacité insatiable du Bey, leur fortune qui est énorme; mais le Bey n’est pas dupe de toutes ses manœuvres, aussi les Ben Ayed peuvent-ils s’attendre à quelque tour de son métier.

On raconte, et nous le donnons comme certain, que lors du séjour de l’amiral Baudin à Tunis, il reçut ainsi que le consul général, de la part du Bey, une invitation à déjeuner à la Mohammadia. Cette invitation fut acceptée; mais en arrivant, le consul déclara au bey que si Ben Ayed fils se mettait à table, l’amiral et lui se retireraient à l’instant. Le coup était rude, et, pour un despote entêté et orgueilleux comme le Bey, la signification devait être violente, la position critique. Il céda cependant et un couvert fut enlevé. un instant après Ben Ayed qui est gros et puissant, se faisait saigner. Depuis cette affaire, l’auréole qui l’entourait s’est considérablement obscurcie; le prestige qui éblouissait les indigènes se dissipent, les murmures, qui n’étaient que comprimés, se font entendre plus distinctement; ses adversaires, ses concurrents reprennent courage; et tout fait présumer qu’à l’aide des mesures que notre consul a prises et qu’il saura bien, Dieu aidant, rendre efficaces et inattaquables, Tunis verra tomber ce colosse de monopoles qui écrase le pays, ruine le commerce et anéantit tous les éléments de prospérité.”

Le Général Mahmoud Ben Ayed.

Voilà les dessous de tables et comment les ennemis du général Ben Ayed préparaient sa chute depuis de nombreuses années avant son exil, on peut dire qu’en finalité il s’en sort fort bien.

Par Kais Ben Ayed.

Le palais Ben Ayed d’Epinay-sur-Seine

palais Ben Ayed

Au XVIIIe siècle, le marquis du Terrail acquiert le domaine sur lequel se dresse l’actuel hôtel de ville. Bâti à l’origine en forme de T à l’effigie de son propriétaire, le château devient ensuite la propriété notamment de Jean-Baptiste de Sommariva, du général tunisien Mahmoud Ben Ayed ou encore de Don François d’Assise, roi d’Espagne en exil. A sa mort, le château est acquis par Georges Thibout, alors maire de la commune, pour devenir en 1908 l’hôtel de ville. Inauguré le 19 juillet de la même année, le bâtiment connut quelques extensions tout en gardant son architecture d’origine.

Epinay-sur-Seine-Hotel de Ville
Façade principale de l’hôtel de ville.
Façade postérieure de l’Hôtel de Ville – ancien château de Ben Ayed.
Vue de nuit de l’hôtel de ville d’Epinay-sur-Seine.
Par Kais Ben Ayed