Le parcours d’un esclave maltais: le capitaine Gio. Stafrachi.
En plongeant dans les registres de l’archive consulaire française à Tunis du 18-éme siècle, on ne peut rester indifférent face au curieux périple d’un maltais nommé Giovanni Stafrachi, qui se trouvait être en 1788, lorsque la course et l’esclavage étaient d’usages de part et d’autre de la Méditerranéen, esclave du puissant caïd de Djerba, Sidy Hamida Ben Ayed.
Les registres nous apprennent que Giovanni Stafrachi avait un frère nommé Guiseppe, à qui il demanda de venir de Malte à Djerba quelques mois plutôt pour le remplacer. En devenant otage, le caïd avait accordé à Giovanni de “vaquer à ses affaires” à Malte. Quoique l’on puisse penser de cette manœuvre, le maltais n’abandonna pas son frère puisqu’après 15 mois, il était de retour à Djerba. Une fois la mission accomplie Giuseppe, illettrée se rendait à Tunis au fondouk des français où il consignait toute l’affaire en chancellerie déclarant ce qui suit.
Les Stafrachi en déclarant la situation aux autorités françaises espéraient-il obtenir une aide quelconque ?
En tout état de cause, deux années plus tard, le 2 novembre 1790, Giovanni Stafrachi regagnait sa liberté en ayant rempli “ses obligations” comme il le déclare dans le contrat de rachat ci-dessous. On y apprend qu’avec le concours d’un négociant génois Nicolas Borzone, ils parviennent à racheter la liberté de deux autres esclaves maltais, sous conditions de remboursements des sommes avancées.
On apprend aussi, qu’un mois et demi plus tard, le 17 décembre 1790, Giovanni Stafrachi affrète la tartane Le Saint-Antoine commandé par le capitaine Jacques Antoine Barberousse de la Ciotat pour un voyage de la Goulette à Malte où son voyage prendra fin.
Après avoir vécu une telle expérience, il serait un impensable que Giovanni Stafrachi s’aventurerait une nouvelle fois aux abords de Tunis. Et pourtant, le voici moins d’une année plus tard, le 6 octobre 1791 de nouveau dans la chancellerie du fondouk des français mais pour y faire cette fois-ci affaire avec son ancien patron Sidi Hameida Ben Ayed. Le maltais achetait par l’entremise d’un des hommes d’affaire du caïd, un pinque génois prise faite par l’un de ses corsaires pour la somme de cinq cent sequins comme le mentionne le contrat ci-dessous.
Nous n’avons trouvé aucune trace de la précédente vie de Giovanni Stafrachi. Son nom n’apparait plus dans les registres consulaires français après avoir acheté le pinque du caïd de Djerba. On pourrait cependant penser qu’avant sa capture le maltais aurait été membre d’équipage ou capitaine, hypothèse qui se confirme car son nom réapparait dans les registres du port de Trieste en Italie en 1814. On y fait apprend que le capitaine Giovanni Stafrachi fait son entrée arrivant de Smyrne à bord d’un brigantin sous pavillon anglais et portant le nom d’Ulisse…
Ce qui est certain c’est que tout comme Ulysse, le capitaine Giovanni Stafrachi aura été profondément marqué par son périple et son passage sur l’ile des lotophages, Djerba.