La branche princière de la famille Ben Ayed

Après quelques années de vie à l’européenne à Paris, dont il fut vite lassé le Général Mahmoud Ben Ayed décide de s’installer en Turquie. Amateur de grand luxe, le général tunisien ne lésine pas sur les moyens et se construit un Yali sur les bords du Bosphore à Uskudar, quartier huppé de Constantinople. Il a notamment comme voisin le vice-khédive d’Egypte Mustapha Fazil.

C’est dans ce cadre que deux de ses enfants, son fils Mohamed Taher et sa fille Saliha Zayneb prirent respectivement comme épouse et époux, la princesse Roukia Fazil et le prince Kamel Fazil.

La Princesse Rukiye Fazil Ben Ayed, fille de Mustapha Fazil Pacha, Vice Khédive d’Egypte.
Hommage de l’écrivain O. Ikskender pour les fiançailles de Taher Ben Ayed avec la Princesse Roukiye.

Mohamed Taher, née à Tunis en 1853 de l’alliance du Général Mahmoud et de la dame Daddou Bent Hamda Djilani, il épousera la Princesse Roukia Fazil, fille du Vice-Khédive d’Egypte Mustapha Fazil, et demi sœur de la fameuse princesse Nazli en octobre 1872.

Acte de décès du Prince Taher Ben Ayed, mort en 1921 à l’âge de 68 ans.
Le Prince Mahmoud Ben Ayed au cours d’un duel avec Mr De Latorre en janvier 1900 à Paris.
Le Prince Adel Ben Ayed aux funérailles de son oncle le dernier Khédive d’Egypte Abbas Helmi en 1944.
La Princesse Ain EL Hayat Ibrahim Ben Ayed épouse du Prince Adel Ben Ayed.
Le Prince Ibrahim Ben Ayed, ingénieur en sécurité aérospatiale.
Le Prince Rechid Ben Ayed.

Le Prince Kamel Fazil, est le troisième fils de Mustapha Fazil Pacha d’Egypte. Il épousera en seconde noce Saliha Zayneb la fille du Général Mahmoud Ben Ayed, en 1886 à Alexandrie.

Prince Kamel Fazil, époux de la princesse Saliha Zeyneb Ben Ayed.

Le couple Mohamed Taher et la Princesse Rukiye donnera naissance à une nombreuse descendance, les princes Mahmoud, Mohamed Ali, Jameleddin, Adel, Ibrahim, Rechid, et les princesses Fadhlia, Tawhida et Nazli.

La Princesse Nazli Ben Ayed et sa robe.

Le couple Saliha Zayneb et le prince Kamel Fazil donnera naissance à un fils Mustapha Kamel Fazil et une fille Amina Fazil.

Le Prince Mustapha Fazil, fils de la Princesse Saliha Zeyneb Ben Ayed.
Le Prince Mustapha Fazil, petit fils du Général Mahmoud Ben Ayed.
La Princesse Amina Fazil, fille de la Princesse Saliha Zeyneb Fazil Ben Ayed et du Prince Kamel Fazil
La Villa Sphinx dernière demeure du Prince Kamel Fazil et de la Princesse Saliha Zainab Fazil Ben Ayed.
La Villa Sphinx dernière demeure du Prince Kamel Fazil et de la Princesse Saliha Zainab Fazil Ben Ayed .
Mort du Prince Kamel Fazil dans sa Villa Le Sphinx à Nice en 1929.
Par Kais Ben Ayed

Inauguration de la Rue Docteur Hassouna Ben Ayed

En hommage au Professeur Hassouna Ben Ayed, fils de l’île de Djerba, une rue de Tunis à Bab Saadoun, à proximité de la faculté de médecine dont il fut le doyen durant de nombreuses années portera désormais son nom. La rue du Docteur Hassouna Ben Ayed remplacera ainsi la rue du Djebel Lakhdar.

Le Dr Hassouna Ben Ayed à Paris en compagnie de son professeur Jean Hamburger.
Le Pr Hassouna Ben Ayed et son dévouement pour la médecine tunisienne.
Le Prs Farhat Ben Ayed, frère de Si Hassouna.

Six images inédites de Djerba en 1873

Découvrez six images inédites de Djerba et son histoire. Il s’agit des plus anciennes illustrations pour certains lieux qui date de 1873.

Bordj Ajim en 1873
Borj Ghazi Mustapha ou le fort espagnol en 1873.
Borj El Castil ou Kastil en 1873.
Vue de Houmt Souk en 1873.
Mosquée de Guellala en 1873.
Djemaa Ghroba ou Mosquée des Etrangers en 1873.
Kais BEN AYED

La manufacture de draps d’El Battan à Tébourba

Cette manufacture de draps et d’habillement des troupes a été construite par le Général Mohamed Ben Ayed en 1844 pour diminuer les importations de la régence et assainir les compte de l’état, c’est le début de l’industrialisation en Tunisie dont la famille Ben Ayed a été l’initiatrice. La famille Ben Ayed avait fait appel à l’ingénieur français Charles Benoit pour la réalisation de cette manufacture qui était considérée de haute technologie pour l’époque. Aujourd’hui elle abrite les Haras de la FNARC ( Fondation Nationale d’Amélioration de la Race Chevaline).

Manufacture et palais Ben Ayed d’El Battan à Tébourba.
La plus ancienne illustration de la première manufacture textile industrielle tunisienne telle que construite puis exploitée par le Général Mohamed (puis Mahmoud) Ben Ayed à Tébourba, en 1844. Illustration de P. Trémaux réalisée entre 1847 et 1854.
Kais Ben Ayed

Le Palais Ben Ayed de Gammarth

Le Palais Ben Ayed de Gammarth a été édifié vers 1831, par le Général Mohamed Ben Ayed, envoyé extraordinaire auprès du Roi Louis Philippe de France par le Bey de Tunis Hussein II à la suite de son voyage en Europe. Le Général avait voulu construire une somptueuse résidence d’été comme ceux qu’il avait pu observer durant son voyage.

Le Palais Ben Ayed devient durant le protectorat un centre polyvalent spécialisés dans les métiers ruraux, on y enseignera l’horticulture et les techniques de grandes cultures sur plaines.

Plus récemment après l’indépendance il est réhabilité en centre détention et de rééducation pour mineurs.

Malheureusement, il est très mal entretenu et il tombe en ruine, il nécessite une intervention d’urgence pour sa sauvegarde.

Découvrez ce patrimoine en vidéo:

Palais du Général Mohamed Ben Ayed à Gammarth
Kais Ben Ayed

Découvrez l’expo photo en vidéo

Notre ami Si Jalel Fathallah, fervent amoureux de l’île de Djerba vous propose à travers sa caméra de découvrir le Palais Ben Ayed de Cédriane ainsi que l’exposition photographique de nos deux artistes locaux Safwen Tlili et Koussay Kabaoui qui s’y déroule actuellement jusqu’au 27 décembre de 10H à 17H.

Exposition photographique au Palais Ben Ayed de Djerba les 25,26,27 décembre 2021.

Les coulisses d’un Sérail

Vahida la mère du Sultan se rendit auprès de son fils, le Sultan Abdulaziz, trônant sur l’Empire Ottoman depuis 1861 suite à la mort de son frère Abdulmecid. Dès qu’elle entra le Sultan se pressa alors à l’accueillir et pris sa main respectueusement et la fit assoir auprès de lui:

– Chère Mère je vous ai demandé car je voudrai vous faire part d’un souhait qui j’aimerai qu’il soit réalisé à travers vous.

La mère du Sultan pris alors la tête de son fils et déposa un baiser sur son front et lui dit:

– Mon fils vous êtes le Sultan, et tous les pouvoirs sont entre vos mains alors qu’elle est ce souhait pour lequel vous auriez besoin de mon aide pour qu’il se réalise ?

– Oui Mère, je sais qu’il m’est possible d’obtenir tout ce que je désire sans que personne n’y contrevienne mais je suis respectueux de nos traditions et voici ce que je désire:

– Parlez mon fils !

Sultan Abdulaziz

– L’année dernière, il nous a été offert par Mahmoud Pacha Ben Ayed le Tunisien, trois jeunes filles des femmes de son Palais, elles m’avaient séduits et je voulais qu’elles fussent traitées dans le palais d’une façon particulière, j’avais donc ordonné qu’elles soient mise sous votre protection et que vous leur accordiez un soin particulier.

Le Pacha Mahmoud Ben Ayed

– Oui, et les trois filles: Yoldez, Najia et Safinaz vivent depuis avec moi, et dînent à ma table chaque soir !

– Mère, je voudrais épouser l’une d’entre elles. Elles sont à mes yeux digne de porter le titre de Sultane et c’est ce dont j’en ai envie…

– Et qui est l’heureuse élue sur laquelle s’est portée votre choix ?

– Safinaz, la plus intelligente des trois et la plus belle ! Discutez-en avec elle et faites lui part de mon souhait.

– Vous aurez ce que vous désirez mon fils !

La Sultane Safinaz.

La mère du Sultan s’empressa de porter la nouvelle à la jeune fille et fit part de la discussion qu’elle eut avec le Sultan, elle la félicita par la suite croyant qu’elle allait s’en réjouir. Mais Safinaz se jetta aux pieds de la mère du Sultan, et se mit à pleurer !

– Je n’ai pas connu mon père, j’ai été enlevée à ma famille, jeune fille. Je ne sais si je suis turque, circassienne, européenne ou arabe ? Votre tendresse et l’année que j’ai passé en votre compagnie, dans ce palais, m’a fait oublier tout ces malheurs. Bien sur que le fait que le Sultan m’ai choisie me touche profondément, mais je ne peux pas accepter, je ne veux pas devenir Sultane et je souhaite simplement garder ma position actuelle.

La mère du Sultan ne comprenant pas essaya par tous les moyens de la persuader de changer d’avis et d’accepter la demande du Sultan mais en vain. Elle lui dit:

– Vous avez certainement un secret qui vous tourmente ma fille et que vous ne souhaitez dévoiler … parlez ma fille dites moi la vérité ? Je suis une femme comme vous, une femme qui étant jeune fille avait gouté comme vous aux malheurs que vous goutez aujourd’hui , et comme vous, j’ai été amenée dans ce palais contre mon gré, mais je me suis résignée à accepter mon destin et j’ai oublié ce passé douloureux, j’ai décidé d’accepter ma condition. Parlez ma fille ! Dites moi ce qui vous pousse à refuser ?

Safinaz soupira et répondit:
– Ne me le demandez pas à moi… demander au Prince Abdulhamid !

– Ah ! je comprends enfin ! s’exclama la mère du Sultan.

Le Sultan Abdulhamid II

Le jeune et beau Prince Abdulhamid se baladait dans les enceintes du palais et passait ses nuits dans les beaux jardins, il ne se préoccupait guère du pouvoir.
Il n’avait que 30 ans lorsqu’il aperçu Safinaz. Ils tombèrent follement amoureux et se promirent de se marier dès que cela serait possible.

La belle Safinaz faisait partie du Harem de son oncle le Sultan Abdulaziz et le prince devait se garder de jeter son dévolu sur l’une des femmes de son oncle le Sultan, cela n’était pas permis par les lois et les traditions. La mère du Sultan vint le questionner à ce sujet, il lui fit alors part de son amour profond pour Safinaz et de la promesse de mariage qu’ils se sont faites.

La mère du Sultan savait qu’elle était devant un amour que rien ne pouvait briser et éprouva un penchant pour le prince Abdulhamid qu’elle se décida à aider. Elle lui dit :

– Mon fils, ton oncle est est le Sultan, il a entre ses mains les pleins pouvoirs et peut posséder et faire tous ce qu’il souhaite. Je vais tenter de l’influer, et de le dissuader d’épouser Safinaz. Elle restera alors libre, et vous pourrez ainsi vous marier par la suite.

– Je vous en serai reconnaissant, car mon amour pour Safinaz et un amour devant lequel tout s’estompe, et si par malheur je perdais l’espoir de la marier un jour, j’en serai triste pour le restant de mes jours.

La mère du Sultan, lui promit de faire le nécessaire, et se jura qu’elle célébrerait ce mariage.

Quelques temps s’écoulèrent et la mère rendit visite à son fils le Sultan Abdulaziz, elle lui raconta que Safinaz, était malade, et que les médecins lui ordonnèrent un repos total en s’éloignant de la ville, pour privilégier les régions montagneuses et avoir ainsi plus de chance de guérison de sa maladie. Elle lui fit croire que le mariage devenait impossible car il allait nuire à Safinaz et pouvait certainement la tuer.

Le Sultan Abdulaziz ne pouvait douter des paroles de sa mère et suivant ses conseils, il renonça à se marier avec Safinaz et entrepris de se marier avec sa sœur Yoldez qu’il épousa et dont il eu de nombreux enfants.

Plusieurs jours passèrent, et la mère du Sultan rendit visite de nouveau à son fils lui rapportant la mort de Safinaz. Elle l’informa qu’elle fut enterrée dans le jardin de la demeure où elle résidait en Anatolie. Mais la vérité était toute autre !

Safinaz était en réalité en compagnie de son amour le prince Abdulhamid. Quatre années de bonheur et de félicité s’écoulèrent dans le secret total sans que personne ne le découvre. Ils eurent trois enfants fruit de leur amour. Ce fut pour Abdulhamid les moments les plus heureux de sa vie.

En 1876, le Sultan Abdulaziz fut assassiné. Ce fut l’ainé de ses neveux Mourad, frère du Prince Abdulhamid qui s’empara du pouvoir. Depuis naquit en secret le feu de la convoitise du pouvoir chez le prince Abdulhamid. Après seulement trois mois, Mourad V fut pris de folie passagère et le prince Abdulhamid fut alors investi du pouvoir et devint le Sultan Abdulhamid II. Depuis cet instant, la belle Safinaz que l’on croyait morte refit surface et devint Sultane suivant les lois et les traditions de l’Empire.

Le destin allait en vouloir autrement pour la Sultane Safinaz. Abdulhamid devenait de plus en plus sollicité et bien que Safinaz fut sa favorite, l’amour du pouvoir et du devoir avait surpassé son amour fidèle pour Safinaz. Le souvenir de leur premier amour ne put aider la sultane à se faire à sa cette nouvelle condition et ne pouvait pas supporter l’éloignement de son amour. Désespérée, elle finit par demander le divorce et finit par s’exiler dans l’un des palais sur les bords de la mer Noire jusqu’à sa mort.

Extrait et traduit de l’arabe de “Dans l’enceinte du Palais” de Habib Gamati

Kais Ben Ayed

Attilio Gaudio nous conte Djerba …

Vieux briscard de la presse internationale et ethnologue de renommée mondiale décédé en 2002, Attilio Gaudio était membre de l’Académie française des Sciences, et fut aussi, entre autres, responsable du service Afrique de l’Agence de presse italienne (ANSA), il nous raconte son passage sur l’ile de Djerba dans un article publié en 1966 intitulé “Djerba, l’ile des lotophages”

Attilio Gaudio

DJERBA, L’ILE DES LOTOPHAGES

Au fond du Golfe de Gabès, ou la côte se replie vers l’intérieur de la Tunisie comme pour accueillir au plus loin dans son sein les flots de la Méditerranée, une île paradisiaque accueille, depuis quatre millénaires, les gens et les civilisations que la mer lui apporte.

De tous les rivages de la Méditerranée, des îles grecques aux Baléares, de la Sardaigne à Carthage nul lieu n’est, comme Djerba, une citadelle qui garde et protège les souvenirs des navigants et des rescapés qui ont mis le pied sur son sable fin sous ses palmiers. Tandis que dans tous les autres sites que l’histoire a rendus célèbres, ce sont des pierres qui témoignent de leur passé, à Djerba ce sont les Hommes, ces habitants aujourd’hui insulaires et qui tous descendent de quelques grand peuple de l’antiquité.

HOMERE A CHANTE DJERBA

Homère a chanté cette île où vivaient des bienheureux enivrés par les fleurs de lotus et où les compagnons d’Ulysse faillirent oublier leur patrie au milieu des voluptés étrangères. Le lotus dont parle le poète de l’Odyssée était identifié par les Grecs de l’époque classique par un arbuste de Libye dont les fruits avaient la grosseur d’une olive et devenaient pourpres en mûrissant, Hérodote et Polybe nous apprennent qu’il avait la saveur sucrée de la figue et de la datte et qu’on pouvait le manger nature ou mélangé dans du vin. L’on peut se demander si à l’origine les Anciens n’avaient pas voulu simplement parler de la datte, le fruit du palmier-dattier qui est encore aujourd’hui la principale nourriture des insulaires Djerbiens et d’ailleurs de tous les autres habitants du sud tunisien et de la cité tripolitaine. Le palmier-dattier est aujourd’hui encore non seulement l’arbre nourricier de l’île de Djerba mais l’élément principal, le roi du paysage djerbien. Dans ce pays des palmes, on peut goûter au printemps sa sève délicieuse, le lagmi frais et doux que les insulaires recueillent au flanc des arbres, et en automne l’étranger, tout comme les compagnons d’Ulysse peut toujours assister à la joyeuse récolte des dattes qui met tout le peuple de Djerba en fête et suivre sous un ciel toujours limpide le lent et bucolique travail des hommes à l’ombre des jardins silencieux ou le long des chemins que traversent ries eaux ruisselantes dans un terrain doré qui rappelle déjà le grand désert du Sahara, assez proche. Elle n’est qu’à sept kilomètres du continent, mais cette chaussée que les Romains ont jetée pour l’atteindre semble traverser les temps et empêcher l’évolution des temps modernes de parvenir jusqu’à elle. Déjà un siècle avant la fondation de Carthage, les Phéniciens avaient fondé à Djerba un important comptoir qu’ils appelèrent Méninx Pendant un millénaire, l’île fut tyrienne et les techniciens de ln lointaine métropole vinrent s’y établir pour diriger l’économie du pays. Des ateliers de pourpre parmi les plus réputés de la Méditerranée produisaient sans arrêt la précieuse teinture, bien avant l’île d’Ibiza devenue colonie carthaginoise. Les Berbères qui se trouvaient dans l’île à l’arrivée des Phéniciens apprirent aussi de ces derniers à presser les fruits des oliviers sauvages qui poussaient dans toute l’ile pour fabriquer l’huile, puis à greffer ces oliviers. Des colonnes et des chapiteaux parmi les cactus restent, à proximité de El Kantara, les vestiges de l’ancienne cité troyenne.

"Ulysse au pays des Lotophages" de Théodore Van Thulden
“Ulysse au pays des Lotophages” de Théodore Van Thulden

A DOS DE CHAMEAU

Mais à Guellala, on remonte encore plus loin dans les civilisations maritimes de la Méditerranée c’est une véritable colonie des anciens crétois du 3e millénaire av. J.C. que l’on a devant soi dans ce village de 3.700 Berbères. Dans des ateliers en partie souterrains, des potiers répètent les gestes précis des ancêtres venus de l’Egée Dans les jardins, dans les petites fermes toutes blanches, on pétrit au pied l’argile en pate fine, avant de livrer au tour cette vendange de la terre d ou sortirent les cruches rondes et les pots vernissés. Depuis les époques les plus reculées de la civilisation égéenne, les poteries de Djerba caressent de leurs mains savantes cette argile de la région de Guellala. Et dans leurs fours souterrains toujours chauffés au bois d’olivier, ils cuisent les jarres et les gargoulettes dont les formes pures perpétuent la grâce et la pureté des amphores antiques, qui à bord de navires égéens. grecs, romains et carthaginois, conservaient la précieuse huile et le vin vivifiant pour permettre aux équipages anciens de traverser les mers lointaines.

Comme jadis à bord des navires phéniciens et puniques, les blanches et élégantes poteries de Djerba rejoignent la plage à dos de chameau prennent la mer et s’exportent hors des frontières de la Tunisie. A Sedouikech, autre village berbère aux blanches mosquées couvertes de coupoles et entourées d’oliviers et de dattiers, de lourdes, meules continuent depuis 3000 ans d’extraire l’huile des olives dans les vieux pressoirs souterrains. Des curieux ateliers où des tisserands travaillent sur des métiers primitifs, dont les étoffes d’antan vendue dans les rues de Carthage et de Leptis Magna sortent, encore des superbes jebbas, des couvertures décorées de bandes blanches et rouges et de motifs verts, bleus, jaunes sur un fond rouge cochenille. Ces admirables chefs-d’œuvre justifient leur antique renommée, de même que ces voiles de soie extrêmement précieux entremêlés de fils d’argent doré.

Des fraiches et blanches maisons aux toits en forme de coupoles éparpillées dans les vignobles et vergers sortent et entrent des femmes coiffées d’un long chapeau de paille pointu posé sur des foulards de laine blanche.

Ailleurs encore, autour de ce marché pittoresque de Houmt Soukh, chef-lieu de l’île d’habiles ciseleurs berbères tracent des lacis d’arabes, que sur les grands plateaux de cuivre à l’aide d’un seul burin. Dans ces petites échoppes à trésors des joalliers dont la marque artisanale de leurs lointains ascendants fut appréciée par les matrones romaines et les princesses libyennes, façonnent avec un art qui dans les siècles, n’a pas connu de décadence, des bijoux en argent blanc piqués de corail, d’opaline ou de turquoise et des coiffes étincelantes faites de pièces et de broderies d’or…

Des somptueux bijoux aux modèles berbères et phéniciens parent toutes les femmes de cette île heureuse. Souvenirs des jours passés, elles se les transmettent jalousement de mère en filles et gardent immuables, leur antique beauté

Peut être de l’art
Le petit potier de Djerba, I. Van Mens.

PAREE COMME UNE IDOLE

C’est le jour de son mariage que la jeune fille reçoit ses premiers bijoux. Elles enfilent à ses poignets fins les deux « fradi », lourds bracelets dorés, incrustés de pierre de couleur, vertes et rouges. Elle enserre ses chevilles dans les « khol khal » dorés creux et assez légers pour ne pas gêner sa marche. Puis retenant le drapé de sa longue tunique carthaginoise par un « khal » émaillé d’où pendent des multiples chaînettes tremblantes elle terminera sa toilette en posant sur son front le « tagia », riche collier d’or formé de pièces anciennes, tout semblable à celui qu’elle attache autour de son cou et qu’elle appelle joliment le « ouich ouich mahboub » d’un nom chuchotant qui évoque le cliquetis léger des pièces entrechoquées à chaque mouvement de tête. Ainsi, parée comme une idole, son fin visage brun cadré d’or, elle apparaîtra à celui qui sera désormais, pour toujours, son mari. “Lair y est si doux à Djerba qu’il empêche de mourir” disait Flaubert. Il faut ajouter: la terre, la mer et les palmiers de cette ile sont si beaux qu’ils donnent la joie de vivre dans un rêve d’Orient. Une chanson populaire tunisienne dit que Djerba est le cadeau que la mer a lait aux hommes. En effet, cette mer douce du golfe de Gabès ne cesse de faire des présents à cette ile: Les poissons font la richesse de ses pécheurs et le plaisir des chasseurs sous-marins. Grâce à ces poissons, la Méditerranée a toujours permis à cette ile de vivre, à cette oasis idéale de flotter sur elle comme une fleur de lotus sur les eaux. Voilà pourquoi Djerba garde toujours pour l’étranger une immuable atmosphère de légende et d’oubli.

Peut être une image en noir et blanc de 1 personne, enfant, position debout et plein air
Mariage à Djerba de S. Massa

Attilio GAUDIO.