Le voyage à Djerba du Baron Heinrich Von Maltzan

Le Baron Heinrich Von Maltzan est un célèbre explorateur allemand du 19 éme Siècle, qui a visité la Tunisie en 1869. Au mois de Février après avoir fait le tour de quelques villes de la Régence, il se rend de Sfax à Djerba par la mer.

Heinrich Von Maltzan

De Sfax à Djerba

Le soir du 12 février, V. Maltzan embarque sur une goélette dont le rais Mohamed et la majorité de l’équipage sont djerbiens. Il est étonné de l’harmonie qui règne au sein de l’équipage et nous donne une brève description du Rais djerbien, qui en tant que pieux musulman prend à sa charge un jeune mi-grec mi-arabe pour en faire un honnête homme et un bon musulman. Il n’hésite pas également à rapparier un compatriote dans le commerce aurait été ruiné en Alexandrie.

Arrivée à Houmt-souk

Mosquée des étrangers en 1848.

Après 48 heures de traversée, le célèbre explorateur fait un arrivée triomphale sur la terre djerbienne, porté sur les épaules des marins. Cela lui évitera de prendre un bain car la mer peu profonde ne permettait au navire même les plus modeste de se rapprocher de la côte. Il est accueilli par l’agent médical du Bey et un commerçant italien qui le conduiront à travers les belles palmeraie à Houmt-Souk, ou se trouve la résidence de fonction du caïd de Djerba, Hamida Ben Ayed récemment investi de cette fonction. Le caïd très cordialement le Baron et ordonne qu’un appartement lui soit affecté durant toute la durée de son séjour. Durant les prochains jours, par suite du mauvais temps, l’explorateur ne se limitera qu’a la visite de Houmt-souk, il cite la mosquée turque et la mosquée des étrangers puis le marché. V. Maltzan est fasciné par le paysage que forme les différentes composantes l’architecture djerbienne, les coupoles blanches des marabouts et des mosquées, les ateliers locaux, ainsi que les arcs et voûtes rondes des bazars, offrent selon lui à ce petit village un aspect très particulier, sans aucun doute l’un des paysages les plus gracieux de l’architecture orientale dit-il. Il visitera également le fort espagnol, et l’église Saint-Joseph et donnera les détails du démantèlement de la Tour aux crânes, qui fut l’un des plus sinistres monuments de l’île.

La tour aux crânes et le fort espagnol en 1848.

Le caïd Hamida Ben Ayed

L’arrivée du voyageur à Djerba coïncide avec la nomination récente de Sidy Hamida Ben Ayed, en tant que caïd de l’île de Djerba, en remplacement du Général Rostem, dont le bilan semblait être catastrophique. Ce dernier est décrit par V. Maltzan comme étant un rapace sanguinaire, “vivant en grande partie à Tunis et ne se souciant guère de la situation de population locale. Il usait des moyens les plus cruels pour extorquer de l’argent n’hésitant pas à faire enchaîner les gens aux arbres, puis les menaçant de les brûler vifs s’ils ne payaient pas, en bref, il remplissait sa bourse sous les larmes et les soupirs de ses subordonnés.”

La Général Hamida Ben Ayed (1875)

Le voyageur semble parallèlement à son séjour avoir mener son enquête sur le nouveau caïd. Pour lui le gouvernement semble avoir pris la bonne décision en désignant, le chef de cette riche famille à ce poste car il constitue selon lui une exception parmi les grands musulmans en général, et les membres de cette famille en particulier. Selon Von Maltzan, le nouveau gouverneur se soucie vraiment du bien-être de ses subordonnés. Loin de forcer le paiement des impôts par la violence, il accorde des facilités et des délais de paiement autant que possible, et ne demande à personne plus que ce qu’il ne peut supporter. Sa façon singulière de rendre justice lui fait gagner l’amour de ses subordonnés. En effet dans la mesure où un accusé est passible de bastonnade, d’emprisonnement et autres moyens habituellement utilisés par les fonctionnaires tunisiens, ce Qâyid semble s’impliquer dans la recherche de la vérité et s’efforce de mettre les choses au clair entre demandeurs et prévenus par des procédures inquisitoires, et contrairement à ses prédécesseurs, il ne requiert d’autres moyens que dans de très rares cas. L’explorateur raconte que : “Le deuxième jour après mon arrivée, j’ai assisté à l’une de ces audiences. Le nombre de plaignants était considérable, mais aucun ne s’en est retourner insatisfait, même les accusés semblaient toujours d’accord avec le verdict. Mais ce qui constitua la chose la plus marquante pour les Djerbiens fut le fait qu’avec l’avènement du nouveau Qâyid toutes les taxes financières dont ils avaient été frappées jusqu’alors furent suspendues. À la suite de la rapacité excessive de l’administration précédente, l’île était redevable de sommes considérable, qu’elle devait payer au gouvernement. Aucune comptabilité n’avait été tenue, cela ne permettait pas donc de savoir le montant des impôts qui avaient été réellement déjà réglées. Le nouveau Qâyid, dans son abondante richesse avait dès le départ, assumé ces sommes comme sa propre dette personnelle. Ces avances seront probablement récupérées par la voie fiscale dans les années avenirs mais cette décision du Qâyid a rendu un service inestimable à tout le pays. Partout à Djerba, je n’ai entendu que du bien du nouveau Qâyid, et même les Européens locaux ne pouvaient rien dire de mal de lui, bien que leurs intérêts fussent mieux sous l’administration précédente.

Visite de Hara Kebira

Malgré, ses compliments sur le caïd V. Maltzan trouve la vie dans la maison du caïd très ennuyeuse. Il est contraint à cause du mauvais de temps de rester en compagnie du fils du dignitaire et de son secrétaire, un juif européanisé, qu’ils trouvent très prétentieux et stupides, car ils ne lui sont d’aucune utilité pour son voyage et ne manifestait pas le moindre intérêt. A la première occasion donc le voyageur se réfugia donc les excursions aux alentours, et il profita d’une après-midi pour visiter Hara Kebira dont il fait la description. Ce petit village lui apparait à première vue pauvre et avec des rues sales. Il se dirige ensuite vers la petite placette où est érigé un petit souk , qui malgré son apparence, présentait une activité commercial importante. Il souligne le contraste avec l’apathie des marchés arabe dans la variété des marchandises qui y étaient proposées à la vente. Afin de fuir le tumulte du marché, il se réfugie dans le silence des synagogues dont il en visite quelques unes. Ils souligne leurs similitudes d’un point de vue architecturale dans leur sobriété et l’absence de décor avec les mosquée djerbiennes qu’il trouve assez belle.

Visite des ruines de Djerba

Après quelques jours à Houmt-souk, apprenant que son voyage allait du retard Heinrich Von Maltzan décide de mettre à profit son temps pour faire un tour des ruines romaines de l’île. Il se rend donc à Ajim dans un premier temps, durant le trajet il est fasciné par la beauté du paysage, avec ses palmeraies et ses oliveraies et la fertilité que procure l’île de Djerba qu’il décrit comme un tapis vert. Le but principal de sa visite à Ajim était d’explorer les ruines des Henchir Bu Ghrara et Henchir Rumiya, mais une querelles de la Tribu Ouerghemas rendant cette excursion très dangereuses, lui fit abandonner cette idée. Il passa la nuit à Ajim où il profita de l’hospitalité du Moqqadem d’Ajim. Le lendemain, il se rendra aux ruines d’El Kantara, où il découvre les restes d’une grande richesse de la capitale qui fut autrefois Meninx. Il se rend ensuite à Ḥenchir Borgo non loin de Cedriane dont qui lui interpelle beaucoup de question. Enfin il décide de rejoindre Houmt-Souk en passant par le pittoresque village de Guecheine.

Embarquement pour Aghir

Le 24 février Von Maltzan embarque depuis Houmt-Souk dans le navire du Rais Amr El Haddad, un drôle de personnage qui lui donnera beaucoup de mal pour se rendre à Tripoli. Après trois heures et à son grand étonnement, les marins jettent l’encre à Aghir, où le voyageur devra patienter encore quelques jours. Il y à terre un logement dans une pièce lugubre au pied du Bordj qui était occupé à cet époque par une garnison de soldat. Il passera ses journée en attendant la venue du Rais, dans la chasse et profitera pour visiter le village de Midoun. Il fera également la rencontre d’un soldat qui lui fera découvrir un spectacle hors du commun et des plus fabuleux qui restera pour lui inoubliable, un festival de danse djerbien (mahfel) organisé dans un décor innatendu une maasara ou huilerie souterraine de Djerba.

Vous trouverez ci-dessous le récit fascinant du passage d’Heinrich Von Maltzan à Djerba extrait de son livre Voyage dans les Régences de Tunis et Tripoli disponible uniquement en langue allemande et que nous avons traduit en langue française pour le plus grand bonheur des amoureux de Djerba.

Voyage-à-Djerba-par-Heinrich-Von-Maltzan-f

Remerciement à M. Ramzi Rais, pour son aide à la reconnaissance de certains endroits de l’île de Djerba.

Par Kais Ben Ayed

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *